Intervention de Patrick Kanner

Réunion du 5 février 2019 à 14h30
Croissance et transformation des entreprises — Article 44

Photo de Patrick KannerPatrick Kanner :

Monsieur le ministre, vous avez dit, au sujet des brevets, que les faits étaient têtus. Les chiffres aussi ! Il vous faut 47 milliards d’euros pour financer la dette de la SNCF ; il vous faut 9 milliards d’euros pour l’extension de l’exonération de la taxe d’habitation pour les 20 % des ménages les plus aisés ; il vous faut 11 milliards d’euros pour financer les mesures d’urgence économiques et sociales que nous avons adoptées dans les conditions que vous savez, mes chers collègues, à la fin du mois de décembre. Donc, il vous faut beaucoup de cash, monsieur le ministre, et ces privatisations, qui s’inscrivent dans une période de croissance extrêmement fragile – les chiffres de l’INSEE nous le démontrent – sont finalement une mauvaise illustration d’une gestion aléatoire de notre pays.

Vous voulez d’abord renflouer les caisses asséchées de l’État, mais c’est du one shot, comme l’ont bien relevé les collègues qui se sont exprimés précédemment.

Plutôt que de vendre et d’empocher un chèque d’un montant moindre, nous préconisons de garder publiques, pour continuer d’enregistrer des bénéfices, ces entreprises florissantes. S’il n’y avait pas d’exemple dans le passé, on pourrait vous excuser et croire à l’inexpérience, mais il y a l’exemple rappelé à plusieurs reprises de ces sociétés autoroutières, lesquelles se positionnent aujourd’hui sur les aéroports pour anticiper la future perte de leurs concessions. Mais l’État est-il là pour pallier la perte de ces concessions, alors que beaucoup contestent aujourd’hui la pertinence de ces privatisations ? Est-on obligé, monsieur le ministre, de faire une erreur pour pallier la fin d’une autre erreur ?

Concernant ADP, l’exemple de l’aéroport de Toulouse, qu’a rappelé notre collègue Viviane Artigalas, montre bien que le choix a été aussi aléatoire.

Monsieur le ministre, les infrastructures structurantes de notre pays sont des outils stratégiques que la collectivité publique doit continuer d’administrer pour l’intérêt général, pour la pérennité des investissements, pour ne pas subir les aléas des marchés, pour des questions de sécurité. Aussi, entendez nos arguments, qui proviennent des deux côtés de cet hémicycle, mais aussi de son centre : vous le voyez, votre projet de privatisation ne suscite pas une opposition de principe, mais il soulève de réels problèmes.

Monsieur le ministre, tout cela devrait vous alerter. Vous ne pouvez pas avoir raison tout le temps et contre tout le monde. Écoutez pour une fois le Sénat, ne bradez pas notre patrimoine, le patrimoine des Français.

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