Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 12 février 2019 à 21h45
Programmation 2018-2022 et réforme pour la justice – renforcement de l'organisation des juridictions — Article 32

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

Nous pensons qu’en matière pénale ce texte marque un recul de la place du juge d’instruction et des droits de la défense.

Il octroie aux policiers, sans garde-fou, des pouvoirs d’écoute, de géolocalisation et de perquisition pour une multitude de délits qui n’ont rien à voir avec le grand banditisme ou le terrorisme.

Il fait ainsi entrer encore davantage l’état d’urgence dans l’État de droit.

La justice repose sur le principe de la balance entre l’accusation et la défense. Sans équilibre, vous n’avez plus de justice. C’est la conception même de cette dernière qui est menacée, comme cela a déjà été plusieurs fois indiqué, en particulier lors de l’examen des articles 28 et 29.

L’article 32 étend le pouvoir des enquêteurs par l’intégration dans le droit commun des dispositifs actuellement prévus pour la seule poursuite des délits qui encourent une peine de prison de plus de cinq ans et les infractions de terrorisme ou de criminalité organisée.

Les pouvoirs exceptionnels confiés aux enquêteurs dans le cadre de l’enquête de flagrance, qui sont justifiés par un crime ou un délit qui vient d’être commis, n’ont aucune raison d’être étendus à un autre cadre juridique.

Alors qu’une réflexion sur la restriction de ce régime dérogatoire de l’enquête de flagrance à une durée strictement limitée à l’urgence serait nécessaire, le projet de loi prévoit au contraire l’extension et la banalisation de ce dispositif par deux moyens.

Il étend, premièrement, la durée de la flagrance à seize jours lorsque la procédure porte sur un crime de droit commun ou sur une infraction prévue aux articles 706-73 et 706-73-1 du code de procédure pénale concernant la criminalité organisée.

Il étend, deuxièmement, la possibilité de prolongation de l’enquête de flagrance à l’ensemble des infractions punies de trois ans d’emprisonnement ou plus, la formulation de la disposition et la confusion de l’étude d’impact ne permettant pas d’exclure tout à fait formellement une application aux crimes de droit commun et aux infractions prévues par les articles 706-73 et 706-73-1 du code de procédure pénale, ce qui porterait dans ce cas le délai maximal à vingt-quatre jours.

C’est pourquoi nous souhaitons la suppression de cet article particulièrement attentatoire aux libertés fondamentales, alors que, en parallèle, une réduction sensible de l’autorité judiciaire est à l’œuvre.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion