Intervention de Maurice Antiste

Réunion du 12 février 2019 à 21h45
Programmation 2018-2022 et réforme pour la justice – renforcement de l'organisation des juridictions — Article 42

Photo de Maurice AntisteMaurice Antiste :

Le Gouvernement projette de réserver la cour d’assises en première instance aux crimes dits « les plus graves », à savoir ceux qui sont punis de plus de vingt ans de réclusion criminelle. Il s’agit a priori des meurtres et assassinats, ainsi que des crimes commis dans le cadre d’une récidive. Les crimes punis de vingt ans de réclusion ou moins, comme les viols et les vols criminels, seraient donc renvoyés non plus devant la cour d’assises, mais devant la cour criminelle départementale.

Il résulterait de cette décision une hiérarchisation de la gravité des crimes, certains étant de fait qualifiés de moins graves que d’autres.

Il convient aussi de souligner la régression qui en découlerait pour les viols, qui relèveraient désormais de la catégorie des crimes « moins graves ».

Ainsi, le but réel n’est pas la réduction des délais de jugement, mais la réduction budgétaire !

Pourtant, le dernier rapport de la Commission européenne sur l’efficacité de la justice, publié en 2016, est édifiant : avec 64 euros par habitant et par an consacrés au système judiciaire, la France figure en bas du classement des pays européens. Cette situation aurait dû amener le Gouvernement à augmenter significativement le budget de la justice, afin que la France rattrape son retard en la matière et qu’elle réponde aux exigences du droit européen.

Enfin, de telles infractions seraient jugées sans la garantie et le regard d’un jury populaire, mais les peines encourues seraient les mêmes que celles que l’on attribue habituellement en cour d’assises.

Pourtant, le jury est un échantillon parfaitement représentatif de la population d’un département et le contexte sociologique et historique permet parfois de comprendre les raisons d’un passage à l’acte.

En Martinique, la population est essentiellement créolophone et les mots employés n’ont pas toujours la même signification que celle qui est retenue dans l’Hexagone, même en français. La suppression des jurés au sein de notre territoire ne ferait donc qu’accroître le clivage culturel qui existe déjà entre les justiciables et leurs juges.

C’est pourquoi j’ai déposé un amendement tendant à la non-application de cette disposition à nos territoires.

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