Madame la sénatrice Brulin, concernant l’évolution que nous proposons, vous avez évoqué une logique pécuniaire et gestionnaire, qui s’opposerait à la logique de proximité. Je m’inscris totalement en faux par rapport à cette perception des choses.
Comme M. le rapporteur l’a bien précisé, nous ne réduisons en aucune manière ni les implantations des juridictions ni même les compétences qu’elles exercent. Fort au contraire, nous garantissons le maintien de tous les tribunaux d’instance actuels, même s’ils s’appelleront désormais tribunaux de proximité, et nous leur offrons la possibilité d’accroître leurs compétences, lorsque cela apparaîtra nécessaire.
Si nous n’avons pas repris la rédaction exacte que propose la commission des lois, les principes que je viens d’énoncer reçoivent de nombreuses garanties dans notre texte. Je pense notamment à la création d’un juge des contentieux de la protection, qui sera présent dans tous les tribunaux de première instance.
Nous garantissons le lieu, nous garantissons le juge, mais nous garantissons évidemment aussi le personnel. Cette garantie figurera, non pas dans la loi, mais dans les dispositions réglementaires qui accompagneront le présent texte : elles préciseront que les membres du personnel de justice seront affectés dans les lieux précis où ils exerceront leurs activités. Nous considérons en effet que nous ne pouvons pas déplacer ces personnes comme s’il s’agissait de simples pions ; ce n’est pas pensable !
Nous offrons donc toutes ces garanties de maintien de vitalité sur le territoire. Il n’y aura dans les dispositions que nous proposons que des éléments qui permettront de renforcer le rôle des juridictions.
Quant à la spécialisation de certaines chambres dans des contentieux spécifiques, qui a été supprimée par votre commission des lois, je tiens à réaffirmer qu’il ne s’agit pas de créer des chambres spécialisées. Il n’est question que de contentieux très techniques et très peu nombreux en volume, et en aucun cas des contentieux de masse. Lorsque, par exemple, trois tribunaux de grande instance existent dans un même département, un type de contentieux technique sera géré par l’un d’entre eux, un autre par un deuxième, un autre encore par le dernier. Nous aurons ainsi une forme de compétence spécialisée pour des contentieux qui représentent moins de 10 % du volume des affaires jugées par chacun des tribunaux.
Cela correspond à une réalité. Je me trouvais, il y a quelques jours, dans un modeste tribunal de grande instance, dont j’ai rencontré le personnel et les avocats. Ils me disaient eux-mêmes avoir très rarement à traiter du contentieux de la fiscalité indirecte. Ce contentieux pourrait donc être déplacé vers un autre tribunal. En revanche, me demandaient-ils, ne nous enlevez pas tel ou tel contentieux rural, car nous le rencontrons souvent ! Dont acte : la ville voisine n’a peut-être jamais à connaître de telles affaires. Il peut y avoir des équilibres sur des contentieux très techniques, très spécialisés. Cela représentera un progrès tant pour les magistrats que pour les justiciables.
Enfin, madame Noël, c’est avec grand plaisir que je me rendrai au tribunal d’instance de Bonneville pour rassurer son personnel et les magistrats qui y travaillent et continueront d’y travailler !