Monsieur Longeot, il existe déjà une disposition législative sur le péage urbain, et nous avions effectivement envisagé de l'encadrer dans le texte. Cela dit, même en prévoyant l'obligation de mettre en place une concertation avec les communes voisines et les citoyens, des alternatives à la voiture et des tarifications sociales, cet outil ne me semble pas compris aujourd'hui. Du reste, quand il a été contesté, personne n'a souhaité le conserver. En revanche, si vous avez un projet précis, on peut en débattre. Pour ce qui concerne les zones à faibles émissions, toutes les collectivités qui les mettent en place sont conscientes que cela ne doit pas exclure certains de nos concitoyens.
Par ailleurs, les primes à la conversion pour les véhicules anciens ont été fortement accrues, puisqu'elles peuvent atteindre 4 000 euros pour les personnes les plus modestes ou qui utilisent beaucoup leur voiture, et même 5 000 euros s'il s'agit de passer à un véhicule d'occasion hybride ou électrique, sans même parler du bonus pour un véhicule neuf.
Sachez que je suis très à l'écoute de ce qui s'exprime dans le grand débat. Cela dit, nos concitoyens ne s'expriment pas sur ce qui touche à la gouvernance - on ne débat pas de la répartition des compétences entre communes et EPCI ni des délais pour transférer une compétence -, ni d'ailleurs sur l'ouverture des données. Ce qui est exprimé, c'est une attente forte pour des solutions moins coûteuses de déplacement, y compris pour ceux qui n'ont pas de voiture ou qui n'ont pas le permis.
Grâce au travail très étroit de concertation que nous avons mené avec les collectivités et aux appels à projets, le texte instaure les outils requis par les territoires. Nous serons attentifs à ce qui va remonter du grand débat, et qui touche principalement à l'accompagnement individuel. Je me suis rendue à Quiberon pour participer à un débat et, manifestement, nombre de participants ne connaissent pas la prime à la conversion, et s'interrogent sur le choix du carburant. Il faut travailler à la bonne appropriation des aides individuelles, sur l'accompagnement de la mobilité entre domicile et travail.
Je remarque une très forte attente de solutions autres que la voiture et je suis preneuse de tout ce qui pourra inciter au changement de comportement. Évidemment, chacun peut dire que la voiture est formidable, que c'est la liberté, mais chacun constate aussi que la liberté pour chacun, c'est vingt mille véhicules qui pénètrent dans la presqu'île de Quiberon chaque jour d'été. La question est donc : comment passe-t-on à autre chose que la voiture individuelle ? Je pense que l'écoute de nos concitoyens peut nous apporter des solutions.
Monsieur Chevrollier, je ne pense pas que l'on sortira rapidement du recours à la voiture. Dans nombre de territoires, cela restera la colonne vertébrale de la mobilité. L'enjeu est de développer des solutions alternatives à la voiture et, quand on n'a pas le choix, de passer à des véhicules qui consomment moins, donc polluent moins et coûtent moins.
Pour ce qui concerne l'ouverture des données, celle-ci était de toute façon prévue par les règlements européens. On propose de financer le coût de leur mise à disposition, avec le principe selon lequel l'utilisation de données est gratuite pour un faible volume et devient payante pour les volumes importants.
Quant au risque de captation de valeur par les grands acteurs mondiaux, c'est un sujet qui me tient à coeur. Pour avoir été PDG d'une entreprise de transport, je sais que chacun souhaite que les données s'agrègent autour des siennes ; par conséquent, tout le monde attend que les autres commencent. Pour faire face à la concurrence des géants mondiaux, il faut commencer par travailler ensemble et par comprendre les intérêts en commun. C'est la meilleure façon de faire pour éviter que Google soit le grand bénéficiaire du processus. Voilà pourquoi nous tâchons de faire travailler les acteurs ensemble au partage des données.
Nous souhaitons avancer sur le sujet de l'hydrogène. On a ainsi fait un appel à projets en juillet dernier, pour soutenir les écosystèmes dans ce domaine : production d'hydrogène vert et déploiement de solutions. On envisage plutôt de commencer par les flottes d'entreprises ou de collectivités et par des véhicules plus lourds, notamment les trains. Cet appel à projets aura des résultats intéressants.
Monsieur Gontard, les contrats signés avec les sociétés concessionnaires d'autoroutes sont très précis ; on peut avoir ce que l'on veut mais il faut le compenser. Par exemple, les aires de covoiturages prévues sont compensées par des subventions ou par une augmentation des tarifs ; il est rare d'avoir des cadeaux des sociétés d'autoroute, à l'exception notable du rabais de 30 % pour ceux qui font plus de dix allers-retours identiques par mois.
Les projets autoroutiers inscrits seront des concessions nouvelles, ce qui se traduira par des mises en concurrence ; ce sera notamment le cas pour Toulouse-Castres et pour le contournement de Rouen.
Pour ce qui concerne la mission de M. Philizot, nous devons étudier toutes les innovations possibles avec chaque région, afin de sortir de l'alternative insupportable entre refaire la même ligne à l'identique si elle est très fréquentée, ou la fermer. Cette mission consiste à examiner les solutions possibles, avec des montages innovants, en donnant plus de marge de manoeuvre aux régions, et à susciter la créativité pour soutenir les petites lignes.
Sur les nuisances des lignes Sud Europe-Atlantique et Bretagne-Pays de la Loire, nous sommes en train de réfléchir à la façon de concevoir des protections phoniques, comme on le fait pour les aéroports. Ce n'est pas un sujet simple quand on s'en saisit a posteriori.
Monsieur Priou, j'ai répondu à votre question sur le grand débat. Je suis à l'écoute de toute proposition qui vous parviendrait, notamment sur ces aides individuelles et sur les moyens d'encourager les changements de comportement.
En ce qui concerne les recettes des radars, il a été dit clairement que les éventuelles recettes supplémentaires liées au passage de 90 à 80 kilomètres par heure seront consacrées aux structures d'accompagnement des victimes de la route. On ne peut pas considérer que l'insécurité ou l'incivilité routières soient des sources de financement naturel du budget de l'État.
Le rôle de l'État est de porter une stratégie. Les échanges que j'ai eus dernièrement montrent que les grandes infrastructures - routes nationales, liaisons ferroviaires - ont un impact structurant sur le territoire. Construire une LGV sans désenclavement routier peut entraîner une aspiration des emplois. Au-delà, il faut s'appuyer sur les deux niveaux prévus dans la loi NOTRe ; on a deux échelles de conception de la mobilité : l'échelle de proximité, qui est essentielle, car c'est là que s'inventent les solutions adaptées aux territoires, aux besoins des citoyens, et la région, qui a vocation à jouer le rôle d'intermodalité, de cohérence et de coordination.
En arrivant à la tête du ministère, j'ai été surprise de voir à quel point les transports pèsent dans la consommation d'énergie et dans les émissions de gaz à effet de serre. Or la répartition des certificats d'économie d'énergie ne reflète pas le poids de la mobilité, donc nous nous employons à développer des programmes permettant de mobiliser ces certificats au profit de la mobilité.
Le rôle de l'État doit donc être l'aménagement du territoire au travers des infrastructures, la proposition de cadres aux collectivités, et l'animation, l'accompagnement. C'est ce que je vous propose au travers de ce projet de loi.
Monsieur Jacquin, pour les collectivités qui envisagent la mise en place de services non réguliers, on s'est interrogé sur un supplément de cotisation foncière des entreprises ou de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, mais il faut d'abord que la réflexion sur la taxe d'habitation soit stabilisée. Cela dit, le problème le plus important est celui des territoires qui n'ont pas les ressources nécessaires, le potentiel fiscal.
Je suis d'accord, on doit se préoccuper des 39 % de kilomètres parcourus chaque année en France qui sont le fait de poids lourds étrangers, qui ne paient pas la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques. C'est un sujet majeur de préoccupation.
Quant à la captation des plus-values foncières, c'est un sujet sur lequel notre pays n'a été bon que dans le cadre des villes nouvelles - on avait acheté les terrains avant de faire les infrastructures, et on avait financé l'aménagement par les plus-values foncières. La bonne manière de capter la plus-value foncière peut être de passer par les droits de mutation, cela peut faire partie des pistes à étudier, même si on pense plutôt aux taxes sur les bureaux.
Si on veut accélérer un certain nombre de projets via des sociétés de projet, cela ne peut pas se faire en prélevant plus de ressources que ce qui est prévu, ce qui signifie qu'il faut étaler les dépenses et trouver des ressources supplémentaires. En outre, cela ne doit pas s'ajouter à nos dépenses publiques et à notre dette publique. La société du Grand Paris a été consolidée dans les dépenses publiques. Or nos voisins savent engager des PPP non consolidants. Mon ministère travaille à des pistes avec le ministère des finances.
Je serai vigilante sur le maintien des dessertes TGV, mais on me dit parfois qu'une desserte TGV a été supprimée, sans me préciser qu'un Ouigo a été mis en place. Le Ouigo est une avancée importante. C'est le rétablissement d'un modèle de train accessible à tous, que l'on était en train de perdre ; il va concerner vingt-cinq millions de voyageurs par an en 2020. Au-delà de ce point positif du développement du train accessible, je précise que je m'assure que les dessertes sont bien définies en concertation avec les collectivités.
Le fret n'est pas absent de la loi : la programmation des infrastructures comprend un axe important de prévision des investissements sur les transports ferroviaire et fluvial. Notre retard est important dans ces domaines. Voyez notamment les installations de l'axe Seine qui ne sont pas à la hauteur d'un des principaux ensembles portuaires français.
Le fret est bien présent sur la logistique urbaine. La réforme ferroviaire a arrêté la trajectoire mortifère d'augmentation des péages ferroviaires de 5 à 10 % par an, et l'a limitée à la hausse de l'inflation. Il faudrait encourager les pratiques vertueuses en matière de logistique urbaine. Les collectivités ont des outils, mais elles doivent avoir la volonté de les utiliser. Je suis ouverte à toutes les propositions pour soutenir une logistique urbaine propre. Alors que nous restreignons l'usage de la voiture, nous n'avons aucune envie de voir exploser le nombre de camionnettes transportant chacune un colis commandé par e-commerce. N'hésitez pas à me faire part de propositions relevant du niveau législatif.
Ce projet répond à la fracture territoriale, sociale et environnementale que connaît notre pays. Le SCoT peut être aussi une bonne échelle de mutualisation des ressources, il recoupe souvent le bassin de mobilité.