Intervention de Jean-Yves Le Drian

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 23 janvier 2019 à 16h30
Situation au moyen-orient — Audition de M. Jean-Yves Le drian ministre de l'europe et des affaires étrangères

Jean-Yves Le Drian, ministre :

La France le fait déjà en Irak. Jusqu'à présent, on ne pouvait pas le faire autant qu'on le souhaitait parce que la situation sécuritaire n'était pas tout à fait assurée et que le gouvernement n'était pas vraiment encore en place. En effet, les élections ont eu lieu en mai, et il n'a été mis en place qu'en octobre ou novembre dernier. Le gouvernement n'est d'ailleurs pas encore au complet, puisqu'il manque un ministre de la défense et un ministre de l'intérieur.

Monsieur Vial, en ce qui concerne la Syrie, nous avons connaissance de la demande turque de zone tampon de 30 kilomètres située sur le territoire kurde, ce qui peut poser problème. Il faut discuter du périmètre, des garants, des modalités de surveillance. Nous nous interrogeons donc sur cette démarche. Peut-être aurons-nous des éclaircissements lors de la réunion de la coalition à Washington, mais nous n'avons pas pour le moment donné suite à cette proposition. L'idée est ancienne, puisque la même demande avait été formulée au début de la guerre en Syrie.

Que la Turquie demande à assurer la sécurité de ses frontières, c'est normal ! Cela étant, nous souhaitons que les forces démocratiques syriennes et le conseil qui gère la zone soient respectés, comme les Kurdes. Il faut une solution politique. Dans cette affaire, nous avons trois leviers, mais nous n'en aurons plus que deux lorsque les États-Unis décideront de traduire leurs intentions en actes.

Le premier atout était d'ordre territorial : les forces démocratiques syriennes sont nos alliés, et nous sommes intervenus militairement par les airs pour aider à la libération de ce territoire de Daech. Le régime appuyé par la Russie et l'Iran est sans doute en train de gagner la guerre, mais il n'a pas gagné la paix. Nous devrons avoir une discussion sur la paix, dans laquelle notre atout est ce territoire.

Le deuxième atout est la reconstruction : qui reconstruit ? Si cela ne peut pas se faire avec les financements russes ou syriens, l'Europe ou d'autres puissances devront être au rendez-vous. Sinon la reconstruction ne se fera pas ! Si vous ne redonnez pas vie à ce territoire, alors les tentations de terrorisme renaîtront.

Le troisième atout est notre présence au Conseil de sécurité, où nous pouvons faire valoir notre poids et nos positions.

La situation reste encore très confuse et compliquée, avec des jeux tactiques complexes que nous essayons d'identifier. Nous avons une position claire sur le processus politique et sur la nécessité de faire parvenir l'aide humanitaire aux zones susceptibles de la recevoir, à condition que cette aide soit apportée à ceux qui en ont besoin. Sur l'utilisation de l'arme chimique, nous avons une posture très forte qu'il faut maintenir si d'aventure certains étaient tentés de l'utiliser dans les semaines ou les mois qui viennent pour reconquérir tel ou tel territoire.

J'en viens à l'Afrique, où plusieurs élections ont eu lieu au cours de ces dernières semaines.

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