Intervention de André Reichardt

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 13 février 2019 à 9h45
Proposition de loi visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de André ReichardtAndré Reichardt, rapporteur :

La proposition de loi sur le démarchage téléphonique et les appels frauduleux a été adoptée par l'Assemblée nationale le 6 décembre dernier. Elle était présentée par notre collègue député Christophe Naegelen et plusieurs de ses collègues.

Le démarchage téléphonique, ou prospection commerciale, se définit comme la prise de contact par téléphone avec un consommateur en vue de conclure un contrat portant sur la vente d'un bien ou sur la fourniture d'un service. Le droit en vigueur est fondé sur le principe de l'opt out, le consentement préalable du consommateur à faire l'objet de prospection commerciale n'étant pas exigé. L'opt in exige à l'inverse ce consentement préalable.

Un dispositif novateur issu de la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation permet au consommateur de s'inscrire gratuitement sur une liste d'opposition au démarchage téléphonique, s'il ne souhaite pas faire l'objet de prospection commerciale. Il est interdit à un professionnel de démarcher un consommateur qui se serait inscrit sur cette liste. Tout manquement est passible de sanctions administratives ne pouvant excéder 15 000 euros pour une personne physique et 75 000 euros pour une personne morale. Plusieurs exceptions à ce principe sont prévues : en cas de relations contractuelles préexistantes entre le professionnel et le consommateur, pour la presse, pour les activités des associations à but non lucratif ou les instituts de sondages notamment.

La gestion de la liste d'opposition au démarchage téléphonique, Bloctel, est assurée par Opposetel, délégataire de service public désigné pour cinq ans, jusqu'en 2021. Plus de 4 millions de consommateurs sont inscrits sur cette liste. Pour le consommateur, l'inscription s'exerce sans préjudice de son droit de s'opposer à tout moment et sans frais au traitement de ses données à caractère personnel. Le nouveau règlement général sur la protection des données (RGPD) ne remet d'ailleurs pas en cause la possibilité pour les États d'opter pour un système d'opposition a posteriori en matière de démarchage téléphonique. Le droit de l'Union européenne n'impose en effet le consentement préalable du consommateur que pour la prospection commerciale automatisée, c'est-à-dire les courriels, mails, sms ou télécopies.

Le secteur économique du démarchage téléphonique représente un facteur de développement des entreprises et un nombre non négligeable d'emplois en France. Selon des chiffres jugés crédibles par les services du ministère de l'économie, le syndicat professionnel des centres de contacts, qui regroupe les principaux acteurs du marché, estime que 56 000 emplois directs seraient concernés. La fourchette est largement supérieure si l'on prend en compte les emplois indirects ou induits.

Mis en oeuvre depuis 2016, le système d'opposition au démarchage téléphonique tarde à faire ses preuves et l'exaspération légitime des consommateurs est croissante. Près de 1,4 millions de réclamations auraient été déposées par 280 000 consommateurs depuis la création de Bloctel. Plusieurs facteurs expliquent cette situation, dont le non-respect par de nombreuses entreprises de leur obligation réglementaire de mise en conformité de leurs fichiers de démarchage téléphonique avec la liste d'opposition au démarchage téléphonique auprès d'Opposetel, la faiblesse du montant des sanctions encourues, et la rareté des contrôles opérés par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) dont les effectifs ont fortement décru au cours des dernières années.

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