Intervention de Laurent Duplomb

Commission des affaires européennes — Réunion du 14 février 2019 à 9h00
Agriculture et pêche — Réforme de la politique agricole commune pac : rapport d'information proposition de résolution européenne et avis politique du groupe de suivi

Photo de Laurent DuplombLaurent Duplomb :

La politique agricole commune avait été construite pour favoriser la paix. C'est la seule politique européenne intégrée. Elle visait à garantir l'autosuffisance alimentaire de l'Europe, à soutenir la production d'une alimentation de qualité, au prix le plus bas possible pour les consommateurs. Cette politique a réussi : quand nos anciens consacraient 50 % de leurs revenus à se nourrir, l'alimentation ne représente plus aujourd'hui que 8 à 11 % du budget des ménages. Or, avec le développement de la subsidiarité, cette politique sera de moins en moins commune et les différences entre les pays s'exacerberont. Chacun essaiera de prendre des parts de marché aux autres et les principes fondateurs de la PAC, à commencer par la volonté de préserver la paix, seront menacés.

Je m'étonne qu'un point ne figure pas dans la résolution. Le budget de la PAC, qui est de 408 milliards d'euros, devrait baisser de 43 milliards d'euros. Or, si l'on retranche la contribution nette de la Grande-Bretagne au budget de la PAC, qui s'élève à 18 milliards d'euros, écart entre ses contributions et les aides qu'elle perçoit, il manque donc 25 milliards d'euros à ce budget, sans aucune explication ! Nous devrions donc demander des explications sur cet écart de 25 milliards d'euros.

Quid aussi du principe des paiements couplés réservés aux « véritables agriculteurs » ? Que faut-il entendre par cette expression ? Nous devrions préciser notre définition. Si nous n'y prenons pas garde, on aura bientôt en France, d'un côté, des agriculteurs professionnels hyperperformants, à qui on demandera sans cesse de courir le 100 mètres avec un boulet au pied et des normes environnementales, et, d'un autre côté, grâce à la subsidiarité, d'autres « véritables agriculteurs », définis selon une acception plus sociale de l'agriculture, avec une multitude de petites exploitations sur le territoire.

Enfin, il faudrait réaffirmer la spécificité de la France : la France a toujours voulu conserver une répartition équilibrée de son agriculture sur la totalité du territoire. Certes, les aides couplées y contribuent. Mais nous devons réaffirmer que nous voulons que la PAC contribue au maintien de l'agriculture sur la totalité des territoires. Cela suppose de prendre en compte les handicaps naturels et implique une certaine forme de mutualisation entre les régions les plus favorisées et celles qui le sont moins. Si nous ne le faisons pas, l'agriculture se concentrera dans les zones les plus simples à exploiter, au détriment de ce qui fait la beauté de la France, de ses paysages, et donc de l'aménagement du territoire.

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