Monsieur le ministre, le foncier agricole est un enjeu d’envergure pour la France.
Je crois savoir qu’une mission d’information parlementaire commune est actuellement à l’œuvre et qu’un rapport, suivi d’un projet de loi, devrait prochainement nous être proposé. Ce sera l’occasion de renforcer les missions des Safer de façon plus globale. Les problématiques de la proposition de loi en cours d’examen concernent surtout les cultures marines. Il existe, hélas, d’autres difficultés.
Je pense notamment à un problème qu’en Corse nous avons essayé de régler par voie d’expérimentation : celui des démembrements de propriété. Pour faire simple, on peut vendre le lundi la nue-propriété d’un bien agricole, et le mardi l’usufruit, pour échapper à la préemption de la Safer qui ne dispose d’aucun droit dans ce cas et ne reçoit même pas notification de ces cessions.
La Corse dispose de 1 000 kilomètres de linéaire côtier où l’agriculture de plaine est soumise à de fortes pressions foncières. Le retard d’élaboration des documents d’urbanisme, aggravé par les contraintes supplémentaires imposées par le plan d’aménagement et de développement durable de la Corse, le Padduc, participe à une accentuation de ces mécanismes.
Si la Safer est un outil de régulation de première importance, certaines cessions non notifiables et non préemptables, comme la vente en démembrements ou par montage entre sociétés, échappent à sa vigilance avec les risques que l’on connaît, notamment la suppression d’exploitations agricoles économiquement viables par substitution d’un projet non agricole.
Inutile de vous rappeler, monsieur le ministre, que sans foncier, il n’y point d’agriculture, ni de développement rural…
Il existe une solution qui consisterait à caler le périmètre du droit de préemption de la Safer sur celui du fermier qui, lui, peut préempter – je cite le code rural – « en cas de vente portant sur la nue-propriété ou l’usufruit à moins que l’acquéreur ne soit, selon le cas, nu-propriétaire du bien vendu en usufruit ou usufruitier du bien vendu en nue-propriété ».
Cette piste de réflexion que je suggère au Gouvernement, et que je ne manquerai pas de proposer par voie d’amendement lorsque sera soumise au Parlement la loi sur le foncier agricole, a été évoquée par le Président de la République au Salon de l’agriculture. Les territoires ruraux et le monde agricole en ont besoin !