Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure, mes chers collègues, la proposition de loi qu’il nous est donné d’examiner aujourd’hui tend à améliorer la lisibilité du droit par l’abrogation de lois obsolètes. Elle traduit les premiers résultats de la mission Balai – bien nommée… –, qui a été créée en janvier 2018 par le bureau du Sénat pour faire la chasse aux « fossiles législatifs ».
Ce texte apparaît à la fois nécessaire et bienvenu, tant les citoyens sont désarçonnés face à la marée normative que constituent les lois, les règlements, les circulaires, les directives européennes. Pour la seule année 2018, le Journal officiel comprenait plus de 71 000 pages, 45 lois et pas moins de 1 200 décrets et 8 300 arrêtés. La France est bien la patrie de l’inflation législative !
On peut observer ce phénomène à Paris, non loin du Sénat, rue Soufflot, où se trouvent les principales librairies de droit : partout, on y aperçoit de gros codes rouges empilés : codes du travail, de la construction, de l’assurance, du transport…
Évidemment, bien des lois sont rendues nécessaires par la multiplication des sources du droit, tant externes qu’internes.
Cette prolifération normative s’explique également par l’émergence de nouveaux domaines. Ainsi la libéralisation de certains secteurs, comme les transports, les télécommunications ou l’énergie, requiert l’instauration de règles nouvelles. De même, l’essor des technologies de l’information et de la communication suscite la mise en place d’un cadre juridique adapté au développement de l’économie numérique et une nouvelle approche de la propriété intellectuelle.
Le nombre de lois semble ainsi connaître une croissance exponentielle, et la complexité de notre corpus juridique peut apparaître comme un véritable handicap, notamment économique. En effet, un ordonnancement juridique illisible devient rapidement inapplicable et effrayant. Je pense en particulier aux entrepreneurs français qui, pour développer leur activité dans notre pays, ont besoin de sécurité et de simplicité juridiques.
Autres victimes d’un droit trop complexe : les collectivités territoriales. D’après l’Association des maires de France, ces dernières doivent appliquer plus de 400 000 normes.
Ce constat n’est – hélas ! – pas nouveau. Déjà, il y a trois décennies, Jean Carbonnier, éminent juriste et professeur de droit, disait à ce propos : « À peine apercevons-nous le mal que nous exigeons le remède, et la loi est, en apparence, le remède instantané. Qu’un scandale éclate, qu’un accident survienne, qu’un inconvénient se découvre, la faute en est aux lacunes de la législation. Il n’y a qu’à faire une loi de plus. Et on la fait ! »
Ce constat n’a rien perdu de sa pertinence. Aussi, je me félicite que cette proposition de loi vise les objectifs constitutionnels de clarté et d’accessibilité de la loi.
Je me réjouis également que la commission des lois ait souhaité abroger huit lois obsolètes supplémentaires. Au total, le texte de la commission abroge intégralement ou partiellement quarante-neuf lois adoptées entre 1819 et 1940. À cet égard, je tiens à saluer, à cette tribune, la qualité des travaux de notre rapporteure, Nathalie Delattre.
Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la volonté de simplification et de lisibilité du droit dépasse les clivages, et l’examen de ce texte consensuel se prête parfaitement à la procédure de législation en commission.
Aussi, sans réserve, le groupe Les Indépendants votera cette proposition de loi.