Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la France ne se résume pas à Paris. Avec 80 % de la population vivant sur 20 % du territoire et 20 % de la population vivant sur 80 % du territoire, la France est constituée de villages, du village touristique au village agricole, en passant par le village-dortoir.
Dans le cadre de nos fonctions, nous entendons souvent que les nouveaux ruraux souhaitent les mêmes services que leurs concitoyens citadins. N’est-ce pas normal ? Vous l’aurez compris : je ne suis pas en train de parler de ceux qui souhaiteraient que les coqs se réveillent plus tard ou que nos clochers cessent de rythmer la vie de nos villages, mais bien de ceux de nos concitoyens qui ne comprennent pas pourquoi leur lieu de vie est devenu, malgré leurs impôts, une seconde zone, pour ne pas dire une seconde France.
J’entends ceux qui balaient cette question en répondant que, en vivant à la campagne, ils ont, d’une certaine manière, renoncé aux transports en commun, à l’accès aux soins à proximité, aux services de gendarmerie ou encore au haut débit. Ce raisonnement est faux en tout point.
Si certains s’installent à la campagne, c’est pour partie parce que les centres-villes sont devenus trop chers, et non par choix. Quant à ceux qui ont choisi d’y vivre, devraient-ils se contenter de remercier l’État de leur avoir fourni l’accès à l’eau et à l’électricité ? Je ne le crois pas.
Pour tâcher de remédier à cette situation, nous avons mis en place de nombreux fonds, qui, au fil des années, ont fondu.
De plus, le financement des dotations de solidarité urbaine et rurale par écrêtement interne de la DGF revient à dénaturer l’objectif de la péréquation verticale, émanation du principe de solidarité nationale garanti par notre Constitution. Les mécanismes actuels de péréquation ne permettent pas de réduire les inégalités territoriales, qui ont été considérablement accrues en raison de ces baisses de dotations.
À grand renfort de discours sur la « synergie » et la « mutualisation », on nous avait présenté les intercommunalités comme des remparts permettant aux communes rurales de s’en sortir. Force est pourtant de constater que, très souvent, dans les faits, ce sont les communes rurales qui financent les communes urbaines.
Bien sûr – il faut le noter –, certains investissements d’envergure rayonnent sur l’ensemble du bassin de vie, mais – notons-le également – les fonds que j’évoquais précédemment sont progressivement vidés de leur sens.
Par exemple, lorsque les régions votent des subventions, il faut que le projet soit porté par une intercommunalité ; lorsque le préfet dresse la liste des projets susceptibles de recevoir la DETR, les intercommunalités sont systématiquement mises en avant.
À l’heure de la vente par internet, où nos centres-villes sont en pleine mutation, à l’heure où l’on promeut – je pense à nos agriculteurs – les circuits courts et le made in France, notre ruralité peut être une chance. Nos granges peuvent devenir des ateliers d’excellence, si tant est que l’on donne à notre ruralité les moyens d’innover.
Monsieur le ministre, comprenez qu’une ruralité forte, c’est une France forte !