Intervention de Françoise Gatel

Réunion du 19 mars 2019 à 14h30
Orientation des mobilités — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Françoise GatelFrançoise Gatel :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la mobilité est au cœur des enjeux de notre société. L’absence de solution de mobilité assigne à résidence, relègue socialement et professionnellement. Je vous invite d’ailleurs à lire Les Invisibles de la République de Salomé Berlioux, qui décrit comment le manque de solution de mobilité détermine tristement la perspective d’avenir de 60 % des jeunes âgés de 15 à 19 ans.

Ce projet de loi s’inscrit dans une actualité sociale très lourde, née d’un sentiment de déclassement fort et qui a explosé, si je puis dire, à l’occasion d’une augmentation du coût du carburant, en novembre dernier.

Le défi de la mobilité se double d’une formidable opportunité liée aux innovations, qui créent un bouleversement inédit depuis l’émergence de la voiture individuelle.

La commission des lois a fait le choix de se concentrer sur les dispositions relevant strictement de sa compétence, laissant à la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable l’initiative de se prononcer sur les autres sujets. La saisine de la commission des lois concernait donc 16 articles, couvrant cinq thématiques : la définition et la répartition des compétences des collectivités territoriales et de leurs groupements, la protection des données personnelles, la sécurité routière, le droit pénal et la sûreté dans les transports, la domanialité et la commande publiques.

Ce sont 24 amendements qui ont été proposés et adoptés par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, visant à mieux adapter le texte aux réalités locales, à apporter une plus grande sécurité juridique et à garantir la proportionnalité de certaines dispositions.

Le premier axe de la commission des lois a été de favoriser l’exercice des compétences de mobilité par les collectivités territoriales. Nous avons sur ce point souhaité rappeler à tous l’architecture territoriale de notre pays et notre philosophie de l’intercommunalité. Les EPCI ne sont compétents que parce qu’ils se sont vu transférer la compétence par leurs communes membres.

Sur le territoire des communautés de communes, le projet de loi prévoyait un mécanisme complexe pour favoriser la prise de la compétence d’organisation des mobilités par le niveau de collectivité le plus pertinent : l’intercommunalité ou la région. Notre commission a émis deux propositions.

D’une part, nous avons souhaité repousser au 1er juillet 2021 l’échéance du transfert de la compétence aux régions par les communautés de communes qui le souhaiteraient, car, au vu des échéances électorales de mars 2020, la date initialement proposée ne permettait pas de garantir une prise de compétence sereine et pertinente.

D’autre part, nous avons voulu ajouter, aux cas dans lesquels la communauté de communes peut demander à la région de reprendre la compétence d’organisation de la mobilité, celui d’un accord entre ces deux entités.

Enfin, nous avons proposé plusieurs amendements pour améliorer et renforcer la coordination entre les différentes AOM, notamment dans la définition des bassins de mobilité.

Sur cette première partie du projet de loi, le texte issu de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable semble équilibré. Je salue, plus particulièrement, l’introduction de différentes solutions de financement des services de mobilité. En effet, madame la ministre, l’intelligence de votre projet ne pouvait masquer son indigence financière.

Pour protéger les données personnelles dans le domaine de la circulation des véhicules routiers, nous avons proposé de supprimer les habilitations que vous souhaitiez relatives aux traitements de données des « véhicules connectés ». Le champ nous paraissait large et imprécis, alors même que l’atteinte à la vie privée était considérable. Vous avez déposé un amendement tendant à rétablir cette habilitation, avec une rédaction améliorée – notre stimulation n’y est pas pour rien –, ce qui réduit les possibilités d’atteinte aux libertés individuelles.

S’agissant des dispositifs prévus pour faciliter la surveillance automatisée des voies ou des zones réservées à la circulation de certains véhicules, nous avons proposé d’étendre aux services de police municipale la possibilité de recourir à ces dispositifs et, également, de sécuriser certaines phases du traitement des données, nombreuses et très sensibles, ainsi captées, en prévoyant un masquage irréversible des photographies des passagers et des tiers.

Par ailleurs, nous avons veillé à garantir l’équilibre et la proportionnalité des mesures de sûreté et de sécurité, en réservant à l’autorité judiciaire le soin de sanctionner les agressions contre les examinateurs du permis de conduire ; en garantissant la proportionnalité de certaines mesures, notamment en cas de non-paiement de péages sur autoroutes ; en encadrant mieux la possibilité ouverte aux exploitants de services de transport public de recourir à des équipes privées cynotechniques pour la détection d’explosifs ; en s’assurant d’un niveau homogène de sécurité sur l’ensemble des transports du Grand Paris.

Enfin, nous avons amélioré l’article 35 concernant la gestion des ports, pour plus de cohérence.

En conclusion, je souhaite saluer le rapporteur au fond, M. Didier Mandelli, dont les qualités d’écoute ont permis un véritable travail en commun. Le texte proposé nous satisfait sur les points dont la commission des lois s’était saisie pour avis. Madame la ministre, il appartiendra maintenant à l’État d’être à la hauteur de sa promesse républicaine, aux côtés des collectivités.

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