Intervention de Elisabeth Borne

Réunion du 19 mars 2019 à 14h30
Orientation des mobilités — Article 1er A

Elisabeth Borne :

J’ajoute que, pour ce quinquennat, j’ai trouvé 10 milliards d’euros d’engagements non financés.

Je suis tout à fait d’accord avec le sénateur Pointereau : un pays qui n’investit pas est un pays qui se meurt. C’est la raison pour laquelle il vous est proposé, dans la programmation des infrastructures, une augmentation de 40 % des investissements par rapport au quinquennat précédent. J’entends ceux qui nous disent que ce n’est pas assez, mais une telle augmentation, qui représente 4 milliards d’euros supplémentaires, c’est déjà considérable.

Le budget de l’Afitf pour 2019 a été bouclé dans un contexte particulièrement difficile. Notre pays a traversé, ces dernières semaines, une crise grave. Nous avons en particulier annulé les hausses de TICPE prévues en 2019. Néanmoins, toute la recette de TICPE qui devait être affectée à l’Afitf, soit 1, 2 milliard d’euros pour 2019, l’a bien été.

Nous avons également dû faire face à la baisse du produit des amendes radars. À cet égard, je partage totalement l’idée qu’il n’est pas optimal de faire reposer le financement des infrastructures sur une recette fluctuante, dont nous devons tous souhaiter, au demeurant, qu’elle diminue, puisque ce serait une bonne nouvelle pour la sécurité routière sur nos routes.

Le budget pour 2019 a donc été bouclé en tenant compte des calendriers d’un certain nombre de chantiers et en accentuant moins qu’il aurait dû être possible de le faire, c’est vrai, l’effort de régénération des infrastructures. Voilà des décennies que nous sous-investissons dans la régénération de nos réseaux ferroviaires, fluviaux et routiers. Nous augmentons de 50 % les crédits destinés à la régénération ferroviaire. Nous avons accru de 100 millions d’euros, l’an dernier, les moyens alloués à la régénération routière et nous maintenons l’effort pour 2019, notre ambition étant d’avoir une trajectoire ascendante pour les années suivantes. Nous avons également augmenté de 20 millions d’euros le budget de la régénération fluviale.

Malgré un contexte assez particulier, marqué par un certain nombre d’éléments défavorables, liés notamment à la destruction des radars, ce budget pour 2019 est à la hauteur. J’ajoute qu’il nous permet de confirmer, dans le budget de l’Afitf, toutes les autorisations d’engagement qui avaient été décidées.

Il est très important d’être parfaitement sincère, et je continuerai de l’être avec vous. Je le dis depuis des mois, il faudra en effet trouver une nouvelle ressource, à hauteur de 500 millions d’euros. Elle devra évidemment être inscrite en loi de finances.

Le grand débat en cours ne modifiera sans doute pas ce que nous sommes en train de bâtir, en termes de gouvernance, pour permettre aux collectivités de se saisir du sujet de la mobilité au plus près des territoires, non plus que les équilibres que nous cherchons à établir en matière d’ouverture des données. Il ne nous conduira sans doute pas non plus à revenir sur la division par deux du coût de raccordement électrique pour favoriser le déploiement des infrastructures de recharge des véhicules propres. En revanche, il me semble normal d’attendre les conclusions du grand débat pour décider quelle sera la nature de la ressource dont bénéficiera l’Afitf à partir de l’an prochain. Nos concitoyens ne comprennent pas que les poids lourds étrangers qui traversent notre pays ne contribuent pas au financement des infrastructures : c’est un sujet dont ils se sont largement emparés lors du grand débat.

En ce qui concerne les petites lignes, je ne peux pas laisser dire que nous n’aurions pas pris à bras-le-corps ce sujet, qui était mis sous le tapis depuis des décennies.

D’une part, le texte, au travers des mesures figurant dans le projet de loi portant suppression de sur-transpositions de directives, prévoit des simplifications en matière de gestion de ces petites lignes. En particulier, on n’imposera pas une séparation entre le gestionnaire d’infrastructures et l’entreprise ferroviaire allant au-delà de ce qu’exigent les textes européens. Beaucoup de régions n’en peuvent plus de voir leurs petites lignes dépérir en attendant une décision de SNCF Réseau, qui est déjà fortement mis à contribution pour conduire les projets de régénération portant sur le cœur du réseau et qui ne parvient pas toujours, manifestement, à accorder toute l’attention nécessaire à la situation de certaines petites lignes, dont la régénération peut néanmoins parfois présenter un caractère d’urgence. C’est pourquoi j’ai déposé un amendement visant à permettre aux régions qui le souhaiteront de gérer directement ces petites lignes. Je le redis, un état des lieux complet est en cours d’élaboration. Il permettra, dans les prochaines semaines, d’établir pour chacune des régions un véritable plan de bataille concernant la régénération des petites lignes.

En ce qui concerne le transport de marchandises, il n’y a effectivement pas de mesures législatives destinées à modifier son organisation. Cependant, dans le cadre de la réforme ferroviaire, nous avons stabilisé les péages du fret ferroviaire, alors qu’ils devaient augmenter de 8 % à 10 % par an, ce qui aurait sans doute été le plus sûr moyen de tuer le fret ferroviaire. Nous avons aussi prévu d’investir dans les lignes capillaires fret et dans les voies de service. Nous avons enfin confirmé les aides au transport combiné, à hauteur de 27 millions d’euros sur la durée du quinquennat. Cette politique produit des effets : l’an dernier, deux nouvelles autoroutes ferroviaires ont été ouvertes, entre Calais et Turin et entre Calais et Barcelone. S’agissant de l’autoroute ferroviaire alpine, je dois dire que le travail avec nos voisins italiens est un peu compliqué. En tout cas, nous sommes engagés, en ce qui concerne le Lyon-Turin, par un traité international, qui a été ratifié dans les deux pays. Il n’y a donc pas d’ambiguïté pour la France : ce projet doit se poursuivre, et nous demanderons bien évidemment que le financement européen soit porté à 50 %, en nous appuyant sur l’ouverture faite par la Commission européenne.

Le transport fluvial n’est pas oublié non plus. S’agissant du projet de canal Seine-Nord Europe, nous répondons à l’attente, exprimée par les collectivités territoriales, d’une régionalisation de la société de projet. D’autres projets sont prévus, et nous augmentons en outre les moyens alloués à la régénération fluviale. Ces investissements sont bien intégrés dans la programmation qui vous est présentée.

Je ne peux pas laisser dire que ce projet de loi ne porterait pas l’ambition forte d’un aménagement plus équilibré de notre territoire. Les choix d’infrastructures que nous faisons contribueront, me semble-t-il, au développement équilibré de notre pays. En accordant la priorité non plus au TGV, qui accentue le phénomène de métropolisation, mais au renforcement des lignes ferroviaires autour des métropoles et au désenclavement, nous posons un acte fort en termes d’aménagement du territoire.

En ce qui concerne le Gers, la RN 124 sera achevée pendant le quinquennat. La RN 21 fait partie des vingt itinéraires de désenclavement dont la réalisation est prévue, pour un budget de 1 milliard d’euros sur dix ans.

Effectivement, l’aérien n’est pas abordé dans ce projet de loi d’orientation des mobilités, les Assises nationales du transport aérien n’ayant pas débouché sur la préconisation de mesures de nature législative. Quoi qu’il en soit, j’ai décidé de multiplier par quatre le budget des liaisons d’aménagement du territoire. Cette politique était en train de mourir alors qu’il s’agit, selon moi, d’une réponse pertinente et rapide. Les responsables d’entreprises implantées à Aurillac nous disent qu’ils ont besoin, en plus de la RN 122, d’une liaison aérienne. Il en va de même à Castres. Depuis le début de l’année, nous avons confirmé le maintien des liaisons d’aménagement du territoire entre Paris et Limoges, Castres, Quimper, La Rochelle et Poitiers.

S’agissant des grands projets, la LNPN est confirmée dans son ensemble dans la programmation, priorité étant donnée à la désaturation des nœuds. Les travaux commenceront donc par la gare Saint-Lazare, et se poursuivront sur la ligne entre Paris et Mantes. D’ici à 2022, des études de dimensionnement seront lancées pour la gare de Rouen, de même qu’un projet d’intérêt général, c’est-à-dire une protection foncière, pour la liaison Rouen-Barentin. N’oublions pas que les lignes existantes feront l’objet de travaux de régénération, comme beaucoup de lignes qui souffrent d’un retard d’entretien, et que 720 millions d’euros sont prévus, dans le budget de l’Afitf, pour l’achat, à 100 % par l’État, de nouveaux matériels roulants pour ces lignes normandes : ce n’est pas rien. Cette somme représente une partie des 3, 7 milliards d’euros qui seront consacrés au renouvellement, en moins de dix ans, de la totalité des rames Intercités. J’ajoute que la mise en service de la liaison Serqueux-Gisors permettra de sortir du trafic un certain nombre de trains de fret qui viennent perturber les circulations, et donc la régularité des dessertes, sur ces lignes normandes.

Je confirme qu’il est indispensable d’améliorer la liaison Lyon-Saint-Étienne. Suivant les recommandations du Conseil d’orientation des infrastructures, nous proposons, dans la programmation, de ne pas poursuivre le projet d’autoroute A 45, mais de travailler sur une amélioration de la fluidité de la circulation sur l’A 47 et, surtout, de renforcer la ligne ferroviaire entre Lyon et Saint-Étienne. Cette ligne ferroviaire est empruntée par 15 000 voyageurs chaque jour – à titre de comparaison, on compte 900 000 voyageurs par jour sur le RER B ! –, alors que 70 000 personnes font le même trajet la route. Cet exemple montre à quel point nous avons insuffisamment modernisé nos infrastructures ferroviaires pour qu’elles aient toute leur place dans notre politique de mobilité. Si le Parlement approuve notre proposition de mettre un terme au projet d’autoroute A 45, nous déclarerons sans suite la procédure de concession qui avait été engagée.

S’agissant de la liaison Creil-Roissy, je confirme que les travaux doivent démarrer avant la fin du quinquennat.

Si le barreau Massy-Valenton est une infrastructure située en Île-de-France, sa modernisation est fortement attendue par toutes les régions qui bénéficient de TGV en interconnexion.

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