Intervention de Anne-Marie Payet

Réunion du 21 décembre 2004 à 9h30
Questions orales — Plan diabète et prévention des amputations

Photo de Anne-Marie PayetAnne-Marie Payet :

Dans le cadre du programme régional de santé du département de la Réunion, l'observatoire régional de la santé a conduit une enquête sur la fréquence des amputations chez les diabétiques. Selon cette enquête, à la Réunion, l'incidence du diabète est de trois à quatre fois supérieure à ce qu'elle est en métropole.

Le pied représente une zone particulièrement fragile chez le diabétique en raison des complications vasculaires et neurologiques qui touchent l'extrémité des membres inférieurs. Les aspects cliniques de ces complications sont variés, et l'amputation en constitue l'aboutissement le plus tragique. Chez les diabétiques, le taux d'amputation augmente avec l'ancienneté du diabète et avec l'âge, et il est plus élevé chez les hommes.

Ainsi, de 5 % à 10 % des diabétiques seront un jour amputés d'un doigt, d'un orteil ou d'une jambe. Or 50 % de ces amputations pourraient être évitées si des mesures de prévention efficaces étaient mises en place. Les résultats de l'étude menée révèlent que, du 1er mai 2000 au 30 avril 2001, 406 amputations ont été pratiquées dans l'ensemble des sites chirurgicaux de l'île, soit plus d'une amputation par jour ! Plus des deux tiers des patients concernés, soit 279 personnes, sont des diabétiques, parmi lesquels 179 sont atteints du diabète de type 2. Si le nombre annuel d'amputations est stable, le nombre de patients, lui, est en augmentation, du fait d'une plus grande prévalence du diabète.

Parmi les diabétiques amputés, 89 % bénéficient d'une couverture sociale, 62 % d'entre eux relevant de la couverture maladie universelle. Les plus concernés par le risque podologique sont les diabétiques de type 2, qui représentent 92 % des cas, après une durée moyenne d'évolution connue de leur diabète de quinze ans.

Ces chiffres, alarmants, prouvent que le diabète constitue un véritable problème de santé publique dans mon département et conduisent à considérer qu'il est nécessaire d'y mettre en place un programme de prévention des complications podologiques, d'autant que, du fait du climat tropical, la culture locale privilégie le port de chaussures ouvertes, exposant les pieds aux microtraumatismes.

Je pense que cette indispensable prévention doit intervenir à tous les niveaux.

Il faut tout d'abord insister sur le dépistage des diabètes méconnus et des patients diabétiques à haut risque sur le plan podologique.

Il faut ensuite informer sur le traitement ainsi que sur la surveillance des troubles trophiques des pieds et assurer le suivi des patients amputés, en leur proposant un appareillage adapté.

La réduction du nombre de plaies et d'amputations chez les diabétiques passe par la sensibilisation et la formation des médecins généralistes et spécialistes, des infirmiers et des pédicures à ce problème du pied diabétique et à l'urgence de sa prise en charge. Elle nécessite également une harmonisation des actes, nombre des problèmes actuels tenant à un défaut d'organisation entre les différents intervenants.

Face à cette situation hautement préoccupante, et dans le cadre du plan diabète 2002-2005, un groupe de travail composé d'experts, de professionnels et de représentants du ministère et de l'assurance maladie a réfléchi à l'amélioration de la prévention des lésions du pied chez le diabétique pour les patients présentant un risque de lésion du pied de grade 2 ou de grade 3. Cette réflexion a débouché sur la définition d'un forfait podologique, qui a fait l'objet d'un protocole d'expérimentation nationale à travers les réseaux de santé diabète. Ce protocole a été adopté le 4 mai dernier par le comité de suivi du programme d'action diabète 2002-2005.

Monsieur le secrétaire d'Etat, la prévention des complications du diabète fait partie des objectifs fixés par la loi relative à la politique de santé publique. Ces complications sont fréquentes et leur évolution est souvent grave. Leur prévalence est estimée, en France, entre 4 % et 25 %.

A la Réunion, ce sont 3 500 patients qui sont concernés par ce problème et qui ont besoin de soins et d'un suivi podologique. Or ces patients ne sont pas, actuellement, remboursés par la sécurité sociale, alors que le coût d'une amputation s'élève approximativement à 64 000 euros, qu'il en est pratiqué plus de 400 par an et que la moitié d'entre elles pourraient être évitées si, outre une prévention adéquate, les patients avaient les moyens de se faire soigner.

J'espère vous avoir convaincu, monsieur le secrétaire d'Etat, de l'acuité de ce problème à la Réunion. Aussi vous saurais-je gré de me faire savoir quels moyens vous envisagez de mettre en oeuvre pour remédier à une situation qui, trop souvent encore, hélas, connaît un aboutissement tragique.

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