Je m’exprimerai surtout, ici, en tant que président de la mission d’information sur la sécurité des ponts.
Comme vient de le souligner le rapporteur, la commission, à la suite de l’effondrement du pont de Gênes, a proposé au Sénat la création d’une mission d’information, qui s’est dotée des prérogatives d’une commission d’enquête afin de pouvoir disposer de tous les éléments nécessaires.
Il y a en France quelque 200 000 ponts, dont 100 000 sont gérés par les collectivités territoriales. Après avoir déjà réalisé un certain nombre d’auditions et de déplacements dans les régions, nous sommes amenés à constater que certaines préoccupations se font jour, s’agissant surtout des ponts gérés par les collectivités territoriales, notamment par les communes. On le sait bien, l’État et les départements disposent de davantage de moyens techniques, en termes d’ingénierie, et financiers. Beaucoup de petites collectivités territoriales ignorent même combien de ponts relèvent de leur compétence et, a fortiori, quel est leur état. Au regard de la conjoncture actuelle, il est donc très difficile d’imposer de manière brutale et directive des inventaires, des remises en état. Nous sommes en train d’élaborer des propositions tenant compte de ces contraintes, mais il nous paraît important, à ce stade, d’inscrire dans le texte que l’État doit apporter une aide aux collectivités locales pour la gestion de ces ouvrages.
Vous avez cité, madame la ministre, un certain nombre d’organismes qui interviennent déjà, mais ils apportent une expertise : rien n’existe en termes de soutien, notamment financier. Le président de l’Afitf, que nous avons entendu récemment, a clairement indiqué que, si son agence dispose de programmes ou d’enveloppes dédiés à l’entretien des tunnels, il n’en existe pas pour les ponts. C’est une attitude très française : on attend qu’un problème survienne, comme cela a été le cas avec les tunnels, pour prendre des mesures…
Sans attendre les propositions que nous serons conduits à formuler dans le cadre de notre rapport d’information, nous insistons sur le fait que l’État doit accompagner les collectivités territoriales dans la connaissance et l’entretien de leur patrimoine.
Je profite de cette prise de parole pour vous interroger, madame la ministre, sur la situation du pont de Rosselmont, en Moselle, que nous sommes allés visiter dans le cadre de notre mission d’information. Il s’agit d’un pont orphelin, en quelque sorte, l’État et les communes concernées se renvoyant la responsabilité de sa gestion. Ce pont a été construit par Charbonnages de France, à l’époque des houillères. Cette entreprise ayant disparu, ses actifs et son passif ont été repris par l’État, plus précisément par le ministère chargé de l’industrie. Aujourd’hui, bien que ce pont soit dans un état absolument dramatique – des fers sortent du béton, des gravats tombent dans les filets qui ont été mis en place pour protéger le public –, des camions continuent à l’emprunter tous les jours. Le préfet a l’air de se désintéresser totalement de la question. Nous souhaiterions que l’État prenne position quant à la propriété de ce pont, afin que l’on puisse déterminer quelle personne publique a la responsabilité de le remettre en état.