Intervention de Christian Cambon

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 5 mars 2019 à 16h30
Audition de M. Gabriel Attal secrétaire d'etat auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur le service national universel snu

Photo de Christian CambonChristian Cambon, président :

Je me fais l'écho de nombre de nos collègues : le SNU est un véritable projet de société, pour lequel nous partageons - sans doute - des intérêts convergents, mais pour lequel la méthode nous est apparue choquante - méthode certes initiée alors que vous n'étiez pas encore membre du Gouvernement. Le Parlement n'a pas été consulté, alors que ce projet touchera chaque famille !

Une « task force » a été mise en place à l'Assemblée nationale, mais de manière confidentielle, constituée de députés d'un seul groupe politique ; elle ne tient pas lieu de consultation. La consultation en ligne des jeunes a été assez réduite, et leurs associations représentatives n'ont pas montré un enthousiasme débordant. Le SNU n'est pas non plus un sujet du grand débat national, alors qu'il l'aurait sincèrement mérité.

Jusqu'à présent, tout s'est réglé dans l'entre-soi des cabinets et des commissions d'experts, ou sur les plateaux de télévision. Vous avez réservé à BFM et au Point la primeur des contours du projet et annoncé le lancement en juin d'une première expérimentation dans treize départements. Nous attendons vos clarifications sur de multiples interrogations.

La loi de programmation militaire sera-t-elle bien respectée ? Elle dispose expressément que le SNU ne sera financé ni en budget, ni en personnel, ni en infrastructures par les crédits des armées. D'après les estimations du Sénat, son coût, que le Gouvernement n'a toujours pas chiffré, sera compris entre 1,5 et 3 milliards d'euros par an. Or ce projet n'est pour l'instant pas financé... Comment le gouvernement entend-il financer le SNU ?

Cette question se pose dès 2019 : la phase de préfiguration démarrera en juin prochain et concernera 3 000 jeunes dans treize départements, soit un coût estimé à 6 millions d'euros. Vous avez déjà lancé des concours pour définir l'uniforme, mais comment ferez-vous sans un sou, puisqu'aucune ligne budgétaire n'est prévue à cet effet dans la loi de finances pour 2019, ni au budget des armées, ni sur d'autres budgets ?

Mon autre inquiétude concerne l'encadrement, point très important qui conditionne la sécurité du dispositif, s'agissant de jeunes de seize ans. Vous avez laissé entendre dans les médias que les armées pourraient y participer directement. Or c'est contraire à la loi de programmation : seul le recours à des volontaires ayant une expérience militaire - réservistes ou retraités - est possible.

Enfin, je m'interroge sur le rythme de mise en place du SNU. La mise en place des différents modules est peu avancée, or vous visez un démarrage en juin ; quelle sera, dans ces conditions, la qualité de la formation dispensée ? Vous allez commencer sans base légale, ni constitutionnelle, le Conseil d'État ayant indiqué qu'une révision de la Constitution était nécessaire pour rendre le SNU obligatoire : avez-vous bien mesuré tous les impacts juridiques ? Vous envisagez une généralisation aux 800 000 jeunes de la classe d'âge en 2022 plutôt qu'en 2026 : franchement, est-ce réaliste, et avec quels moyens ?

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