Intervention de Jean-Pierre Raffarin

Réunion du 21 décembre 2004 à 16h30
Turquie — Débat sur une déclaration du gouvernement

Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre :

L'Europe que nous construisons regarde vers l'avenir avant de regarder vers le passé.

L'Europe que nous construisons n'est pas une Europe recroquevillée qui a peur ; l'Europe que nous voulons est une Europe ambitieuse qui diffuse sa force et qui croit à ses valeurs.

L'Europe est une communauté de destin qui se définit par son ambition et par son projet.

La Turquie, évidemment, n'est pas prête aujourd'hui à l'adhésion et l'Europe ne l'est pas non plus, mais c'est avec cette vision de l'avenir que les vingt-cinq Etats membres ont permis l'ouverture des négociations pour une éventuelle entrée de la Turquie dans l'Union européenne.

Nous voulons définir notre projet européen, projet de paix, projet de tolérance, projet des droits de l'homme, et nous voulons que la Turquie rejoigne notre projet et partage nos valeurs. C'est à elle de faire le chemin vers le projet européen qui nous rassemble.

Il n'y a pas, vous le savez bien, à confondre négociation et adhésion. Le Président de la République l'a dit, je le redis devant vous, il n'y a pas automaticité de la négociation à l'adhésion.

Chacun le sait, le processus va être long et durer au minimum dix ans et peut-être quinze ans ou vingt ans. Pour une raison simple : ni l'Europe ni la Turquie ne sont prêtes aujourd'hui à cette adhésion. En Europe d'abord, et en France en particulier, il faudra du temps, beaucoup de temps pour faire partager à tous les acteurs concernés l'intérêt de la candidature turque, qui apparaîtra de plus en plus au fur et à mesure des discussions, si, bien sûr, le gouvernement turc se montre coopératif.

Avec la Turquie, je vois plusieurs domaines où la discussion sera particulièrement serrée et sur lesquels nos négociateurs devront être particulièrement vigilants et rigoureux.

En matière de démocratie d'abord. Tous les pays membres de l'Union européenne sont démocratiques et l'exercice démocratique ne saurait y être mis en cause. La Turquie a fait des progrès dans ce sens ces dernières années mais il lui faut encore du temps pour consolider ces acquis et prouver surtout qu'aucun retour en arrière n'est possible.

En matière de respect des droits de l'homme et des minorités : là aussi, des efforts sont nécessaires. Si l'on doit reconnaître des avancées importantes en ces domaines, la Turquie doit, bien sûr, évoluer rapidement vers cette perspective européenne des droits de l'homme, comme le Parlement français l'a dit à plusieurs reprises. Je pense notamment à la reconnaissance du génocide arménien de 1915, qui doit faire partie du nécessaire et complet travail de mémoire que la Turquie doit assumer, comme tous les autres pays européens assument eux-mêmes leur devoir de mémoire.

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