Intervention de Elisabeth Borne

Réunion du 21 mars 2019 à 11h30
Orientation des mobilités — Article 2

Elisabeth Borne :

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi de présenter quelques observations au moment où nous entamons l’examen de l’article 2.

Cet article sanctuarise le versement transport, qui devient un versement mobilité, comme ressource fiscale des autorités organisatrices de la mobilité, bénéficiant à l’ensemble des compétences de celles-ci. Je voudrais, à cet égard, insister sur quelques éléments de contexte.

Le versement transport a augmenté de 50 % en dix ans : en d’autres termes, le prélèvement sur les entreprises est passé de 6 à 9 milliards d’euros. Dans le même temps, la part payée par les usagers a baissé de 1 % par an.

Les augmentations régulières des taux, le manque de dialogue avec les employeurs sur l’utilisation du versement transport, notamment sur la prise en compte des besoins des entreprises, et l’instauration de la gratuité décidée par certaines collectivités territoriales sans concertation avec les entreprises fragilisent l’acceptabilité de cet impôt.

Je suis convaincue que, pour préserver cette ressource, il faut être à la fois exigeant et raisonnable.

Il faut être exigeant, notamment, en matière de transparence et d’utilisation de cet impôt. Le projet de loi introduit plusieurs dispositions en ce sens. En particulier, toute instauration ou modification du taux du versement transport sera soumise à l’avis d’un comité des partenaires : prévu à l’article 4, ce comité associera les employeurs sur chaque territoire. Toute instauration devra également être accompagnée de la liste des services justifiant le taux.

Il convient également d’être raisonnable. À cet égard, plusieurs amendements déposés en vue de la séance visent à revoir à la hausse le taux plafond du versement mobilité ou à élargir l’assiette de celui-ci. Le Gouvernement est défavorable à ces mesures, qui se traduiraient par une pression fiscale accrue sur les employeurs. Il me paraît important de maintenir un équilibre entre les différentes sources de financement des transports en France, dont les usagers et les collectivités territoriales.

La commission a introduit un versement mobilité réduit à 0, 3 % pour les autorités organisatrices qui n’organisent pas de services de transport réguliers. Elle a prévu également un mécanisme de solidarité, via la TICPE – la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques –, pour les territoires dont le versement mobilité aurait un rendement trop faible.

Clairement, la question des moyens est essentielle. Il est normal, bien sûr, d’être attentif à l’existence de ressources pour les collectivités territoriales. Toujours est-il que le versement mobilité, outre les évolutions que je viens de rappeler, est un impôt complexe, pour les entreprises comme pour les autorités organisatrices, qui ne comprennent pas toujours les montants qu’elles reçoivent. Cette complexité interroge sur l’opportunité d’activer cet impôt avec un taux réduit : est-ce la meilleure option ?

C’est pourquoi une réflexion est engagée sur les mesures qui permettraient de dégager les mêmes ressources avec des modalités de perception plus simples. Cette réflexion doit nécessairement s’articuler avec les réflexions en cours sur la fiscalité locale, à la suite de la suppression de la taxe d’habitation.

Dans le cadre de cette réflexion sur la fiscalité locale, je serai attentive à ce qu’une réponse soit apportée s’agissant d’une mesure de solidarité en faveur des collectivités territoriales dont le potentiel fiscal est trop faible.

Au début de l’examen de cet article, je renouvelle l’engagement du Gouvernement à donner aux autorités organisatrices de la mobilité les moyens de développer des services dans chaque territoire : c’est une condition et un objectif que je partage avec vous. Mais, en attendant la fin des réflexions en cours, je proposerai la suppression des deux mesures de financement introduites par la commission.

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