Le courage est de reconnaître qu'il est possible d'y porter remède afin que la France cesse ainsi de se singulariser à son détriment.
Au nombre de ces réformes majeures qu'il nous appartiendra de mener à leur terme, je pense en premier lieu à une réforme qui ne reçoit qu'une timide et bien incomplète réponse. À l'occasion du récent débat sur les prélèvements obligatoires, nous nous sommes efforcés de convaincre le Gouvernement que certaines contributions assises sur le travail, qui sont des impôts de production, détruisent l'emploi dans la sphère marchande.
Dans une économie globalisée, mondialisée, il n'est plus possible de demander aux entreprises de financer la solidarité, notamment le système de santé et la politique familiale. Ces charges salariales sont de véritables « droits de douane à l'envers » auxquels échappent tous ceux, de plus en plus nombreux, qui font du nomadisme économique et qui vont produire hors de notre territoire national.
Dès lors, demandons aux entreprises d'assumer la créativité, l'innovation, l'investissement productif, la production de biens et de services, la création d'emplois. En revanche, cessons de les charger du financement de la solidarité, qui incombe à la nation, c'est-à-dire à l'ensemble des familles et des citoyens. D'où la proposition d'instituer un autre mode de financement de la santé et de la politique familiale.
Si nous taxons la production, elle franchira nos frontières pour rester compétitive. Alors, mes chers collègues, nous pourrons dire en effet que nous nous battons contre la vie chère, mais ce sera moins cher pour moins d'emplois !
C'est en fonction de ces considérations que nous devons prendre garde à la désindustrialisation rampante qui menace notre tissu industriel - qui explique sans doute en partie, monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le trou d'air du troisième trimestre - et dont nous mesurons chaque jour davantage, en notre qualité d'élu local et de terrain, les effets délétères sur le pacte social et sur nos territoires. La France ne doit pas s'abandonner à la désindustrialisation, qui résulterait d'un manque de compétitivité de notre pays.
Le temps presse, messieurs les ministres, car la mondialisation ne nous attendra pas longtemps, et il est de notre devoir de le rappeler sans cesse.
Messieurs les ministres, mes chers collègues, un budget est à l'image d'une société.
Il est nécessairement marqué par le poids du passé et révèle nos contradictions les plus criantes. S'il n'échappe pas à la critique, il ouvre néanmoins, grâce à la LOLF, des perspectives prometteuses pour réformer l'État. Il doit également poser des jalons et nous permettre de prendre date pour les prochaines échéances qui nous attendent. Ces échéances-là seront déterminantes.
Il faudra du temps et une volonté sans faille, à l'abri de la frénésie de l'affichage immédiat qui met à si rude épreuve la crédibilité des acteurs politiques que nous sommes. Ce projet de budget doit ménager mais aussi préparer l'avenir.
Nous avons le devoir, mes chers collègues, de mettre à profit chacun des vingt jours de discussion qui s'offrent à nous pour améliorer le texte que nos collègues députés viennent de voter.
Veillons à le faire d'emblée, afin que le Sénat soit, une fois de plus, à la hauteur des responsabilités que la Constitution lui a confiées et à la hauteur des espoirs que nos concitoyens ont placés en nous.
Animé comme vous de cet esprit d'un bicamérisme offensif, et comme notre assemblée sait si bien le faire, je forme des voeux pour que notre discussion soit riche et fructueuse, au service de l'intérêt de chaque Française et de chaque Français, au service de la France.