Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, monsieur le président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, mes chers collègues, nous nous prononçons aujourd’hui sur l’ensemble du projet de loi d’orientation des mobilités, un texte attendu par les Français et par les collectivités, tant, depuis trop longtemps, certains de nos territoires vivent mal leur isolement.
La politique de la mobilité est une condition de la liberté et de l’égalité. La mobilité, c’est l’échange, qui doit être durable, effectif, et concerner tous les citoyens ; c’est également un vecteur de lien social. Nous espérons donc vivement que les dispositions de ce projet de loi permettront de donner un nouveau souffle aux transports en France, que l’on appelle aujourd’hui « mobilités ». Ce n’est pas le moindre des changements, car la sémantique a de l’importance en la matière.
Nous nous réjouissons que ce texte ait d’abord été présenté devant la chambre des territoires. À cet égard, le groupe Les Indépendants tient à saluer le travail de notre assemblée et de ses rapporteurs – on ne le dira jamais assez –, qui ont su mettre en lumière ses forces et ses faiblesses.
La question du financement a suscité une inquiétude majeure, qui nous a semblé légitime. Les modifications apportées par le Sénat ont amélioré le projet sur ce point, mais il reste encore des incertitudes, sur lesquelles nous devrons travailler.
L’inscription dans le texte de l’affectation d’une fraction de la TICPE à l’Afitf permet ainsi de sécuriser les ressources de cette agence si essentielle. L’État devra tout de même trouver 500 millions d’euros par an ; nous y serons très attentifs lors de l’examen du prochain projet de loi de finances. Nous comprenons les contraintes budgétaires, bien évidemment, mais, ne pas investir aujourd’hui, c’est devoir payer bien plus demain. Nos infrastructures ont besoin d’investissement, cela a été dit durant nos débats. Il nous faut cependant être vigilants quant aux moyens de financement, afin de ne pas tomber dans le concours Lépine de la nouvelle taxe ou de la nouvelle contrainte. Ne montrons pas du doigt tel ou tel secteur.
L’État a besoin d’argent, les collectivités aussi. Nos territoires peuvent faire plus et ils le font déjà ; ils ont néanmoins besoin de moyens et de flexibilité. Nous nous réjouissons ainsi que la gouvernance de la mobilité ait gagné en flexibilité, en permettant une certaine adaptabilité de la compétence mobilité. Paris n’est pas la Corrèze, la baie de Somme n’est pas la région lyonnaise, une solution unique de mobilité pour l’ensemble de la France ne fonctionnera pas.
Nous avons eu le souci de rendre certaines dispositions du texte plus pragmatiques et de faire davantage pour la transition écologique. Nous espérons que nos ajouts visant à promouvoir l’usage des mobilités propres et actives permettront une décarbonation des transports.
La possibilité de cumuler le « forfait mobilités durables » et le remboursement d’une partie de l’abonnement de transports collectifs ne peuvent qu’encourager les salariés à recourir à des moyens de transport propres. Couvrant le vélo, le covoiturage et les véhicules électriques, ce forfait participera nécessairement à la réduction de la pollution. Nous ne pouvons cependant que regretter le fait que sa prise en charge par l’employeur n’ait pas été rendue obligatoire, comme c’est déjà le cas pour l’abonnement de transports collectifs du salarié. Nous craignons que cette prise en charge facultative ne soit appliquée que de manière réduite.
La lutte contre le dérèglement climatique doit être notre priorité. Nous nous félicitons ainsi des avancées introduites en faveur du vélo : mobilité propre et active, celui-ci est un mode de transport qui reste trop peu usité en France ; il était important de favoriser son utilisation.
Qui eût pensé dans notre hémicycle, il y a vingt ans, que nous légiférerions sur l’usage du vélo ? Tout le monde aurait ri en affirmant que c’était dérisoire ! Aujourd’hui, pourtant, le vélo est parmi nous. Être ouvert et moderne, c’est aussi savoir se saisir de sujets contemporains sans les tourner en dérision. Cela a été fait par la création d’itinéraires cyclables, d’abord dédiés aux touristes et qui serviront aux urbains, par la mise en place de stationnements sécurisés et par l’organisation d’une plus forte intermodalité, grâce à la possibilité de voyager avec son vélo dans les transports collectifs. Cela existe déjà et sera renforcé.
L’intermodalité est évidemment une notion incontournable dans le domaine des transports, grâce aux nouvelles technologies. Pour qu’elle soit effective, les offres de transport doivent cependant être ouvertes et accessibles. La mise à disposition des données est cruciale, à ce titre, et nous ne pouvons que déplorer le durcissement de ses conditions porté par certains dans cet hémicycle.
Tout au long de son examen, nous avons pu constater à quel point le texte faisait confiance aux territoires en procédant à une plus large décentralisation. C’est une bonne chose. Il fallait aussi permettre aux collectivités de réguler les moyens de transport au sein de leur bassin.
C’est en effet à l’échelle locale que l’on peut le mieux apprécier les dangers de certains itinéraires et que l’on est le plus à même de poser des limites intelligentes aux nouvelles mobilités.
Nous pensons que les collectivités sont les plus aptes à apporter une réponse efficace, durable et adaptée aux défis qu’elles rencontrent en matière de mobilité. À cet égard, nous nous réjouissons que le Gouvernement ait introduit la faculté, pour les régions qui le souhaitent, de se saisir de la gestion des lignes ferroviaires de dessertes fines, les fameuses petites lignes. Je pense en particulier à Abbeville-Le Tréport.
Ces lignes, oubliées dans le projet initial, sont essentielles au maillage des transports dans les territoires. Aucune solution ne doit être écartée si l’on souhaite sortir du recours systématique à la voiture individuelle et de la situation d’isolement dans laquelle se trouvent les habitants d’une partie du territoire, qui n’ont rien pour se déplacer.
Le texte que nous nous apprêtons à voter devra certainement être revu à l’avenir, compte tenu des évolutions, notamment technologiques, en matière de mobilités, d’intermodalité. En tout état de cause, la question du financement nous conduira à y revenir. Les mesures contenues dans ce texte devront être articulées afin que l’échelon local parvienne à libérer la mobilité sur le territoire français.
En dépit de ses imperfections, le texte comporte, à notre sens, de nombreuses dispositions prometteuses, pour plus de flexibilité, plus d’efficacité et plus d’écologie. Pour cet ensemble de raisons, le groupe Les Indépendants le votera.
Des moyens de transport toujours plus durables, des solutions conçues au plus près des territoires et davantage de confiance aux collectivités et en nos concitoyens : voilà, mes chers collègues, ce en quoi nous croyons !