Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 2 avril 2019 à 14h30
Orientation des mobilités — Explications de vote sur l'ensemble

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

Cette place est d’autant plus importante à tenir que le Gouvernement affiche actuellement un certain mépris mêlé de rancœur envers notre institution. Il recourt toujours davantage aux ordonnances ou aux lettres rectificatives, et introduit par voie d’amendement toujours plus de dispositifs fondamentaux, comme le contenu du sac à dos social, ce qui lui permet de s’exonérer d’une étude d’impact et de l’avis du Conseil d’État.

Nous avons d’ailleurs déposé une motion de procédure pour exprimer notre désaccord sur ces méthodes. Nous réitérons notre propos. Le Gouvernement aurait dû attendre la fin du grand débat pour tenir compte des revendications.

Pour l’instant, ce qui prédomine, c’est l’inertie. Le projet de loi n’apporte aucune réponse aux enjeux soulevés, ceux de l’égal accès au service public, de la justice fiscale, du coût du transport et de la possibilité d’une transition écologique qui ne rime pas avec déclassement social pour les plus fragiles. Il ne répond pas non plus à l’enjeu défini, entre autres, par les « gilets jaunes » d’une maîtrise publique des infrastructures.

Le texte ne prévoit pas de taxe nouvelle ni de recettes nouvelles pour développer l’offre de transports collectifs. Le statu quo est maintenu sur les conditions mêmes de l’exécution du service public et de ses financements, puisque l’Afitf reste dans l’impasse, et ce malgré nos multiples propositions, comme le retour de l’écotaxe ou la modernisation du versement transport, qui n’ont trouvé aucun soutien sur ces travées.

Notons tout de même la volonté du rapporteur de sanctuariser les recettes de l’Afitf grâce au fléchage d’une partie de la hausse de la TICPE. Cette fiscalité écologique, qui rapporte plus de 30 milliards d’euros au budget de l’État, pourrait cependant être davantage affectée au financement des transports, de sorte que la fiscalité écologique ne soit pas un simple alibi permettant d’alourdir les impôts de nos concitoyens.

Nous ne pouvons nier certaines avancées. Quelques-uns de nos amendements, intéressants, ont été adoptés, ce qui a permis : de prendre en compte la nécessité de la relance des trains d’équilibre du territoire et des trains de nuit ; de ne pas envisager l’avenir du fret ferroviaire sous le seul prisme des autoroutes ferroviaires ; d’empêcher que les données soient captées par les Gafam – Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft ; de reconnaître la place du vélo dans l’offre de mobilités ; de supprimer la charte prévue pour les plateformes numériques, forme d’esclavage moderne, lui préférant la définition d’un salariat plus protecteur.

Pour autant, si l’on va au bout de sa logique, ce projet de loi s’inscrit dans un contexte qui contredit ses objectifs.

Madame la ministre, quand nous vous entendons dire que vous ne partagez pas l’idée selon laquelle le transport régulier est nécessaire sur l’ensemble du territoire, nous ne pouvons qu’être en profond désaccord avec votre vision du système de transport. Nous considérons justement que le droit au transport, qui sous-tend l’idée d’un transport public et de masse, l’idée d’un maillage du territoire en réseau, reste à développer et à conquérir pour tous. Nous considérons également qu’il convient de conserver des agents publics pour l’exécution de ces tâches si essentielles et si particulières.

Pour le dire comme nous le pensons, le covoiturage, la trottinette et le vélo, qui restent des modes de transport individuels, ne font pas la maille face à l’immense enjeu des mobilités dans le cadre de flux toujours plus importants. Comprenons-nous bien, ils ont toute leur pertinence, mais dans le cadre d’une stricte complémentarité avec des modes plus structurants, notamment l’offre ferroviaire.

Recouvrir ces nouvelles mobilités des oripeaux de la modernité, c’est nous jeter de la poudre aux yeux pour nous faire oublier votre politique de casse du rail, en totale contradiction avec les engagements pris dans le cadre des accords de Paris. Madame la ministre, vous ne pouvez pas faire passer le désengagement de l’État pour le monde du futur. En effet, c’est bien de cela qu’il est question lorsqu’on parle de gouvernance. Le couple intercommunalité-région ne fonctionne qu’en raison du dépérissement du trio État-département-commune.

De la même manière, l’ouverture des gares par les facteurs confirme le recul du service public, tout comme la fermeture des lignes capillaires et des gares annoncée par les médias, …

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