Intervention de Claude Haut

Réunion du 2 avril 2019 à 14h30
Débat à la suite de la réunion du conseil européen des 21 et 22 mars 2019

Photo de Claude HautClaude Haut :

Madame la secrétaire d’État, au nom du groupe La République En Marche, je vous adresse tous mes vœux de réussite, en espérant que la relance du projet européen sera portée haut et fort.

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, monsieur le président de la commission des affaires européennes, mes chers collègues, je me réjouis de la tenue de ce débat européen en séance publique, qui tombe à point nommé. Il nous donne l’occasion de nous exprimer non seulement sur les conclusions du dernier Conseil européen, mais aussi sur les récents rebondissements intervenus dans le « feuilleton » du Brexit.

J’axerai mon propos sur trois dossiers en particulier, qui mettent à rude épreuve l’intégrité et la force du projet européen : le Brexit, bien sûr, les relations entre la Chine et l’Union européenne, ainsi que les enjeux de cybersécurité.

Le Brexit a largement occupé les esprits et les discussions de ce sommet européen.

Des conclusions spécifiques ont effectivement été adoptées, afin d’entériner un accord clair sur la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne. Cet accord est venu proroger la date de sortie effective, tout en préservant une unité infaillible entre les États membres. Il a réaffirmé notre position constante selon laquelle l’accord de retrait ordonné n’est pas renégociable.

Depuis, l’incertitude est montée d’un cran, puisque, par 344 voix, la Chambre des communes a persisté, signé et refusé ; seuls 44 députés supplémentaires ont été convaincus par Mme May – il en manque encore un certain nombre, cela a été dit, et je ne suis pas sûr que nous arrivions au résultat final espéré.

Plus marquant encore, le Parlement britannique n’est pas non plus parvenu à se mettre d’accord sur les huit options alternatives de retrait qui avaient été proposées par des parlementaires.

Par la force des choses, le débat de ce jour est devenu un débat préalable au Conseil européen extraordinaire du 10 avril prochain, qui a été convoqué par le Président du Conseil européen, Donald Tusk, en vue d’anticiper la nouvelle date fatidique du 12 avril.

Le scénario du pire, qui implique la concrétisation d’un no deal, semble plus que jamais possible. Dans une communication faite le 25 mars, la Commission européenne a indiqué avoir finalisé ses préparatifs d’un Brexit sans accord. Fort heureusement, même si tout n’est pas achevé, le gouvernement français s’est aussi préparé suffisamment tôt à cette hypothèse. Une dernière ordonnance prise sur le fondement de la loi relative aux mesures de préparation au Brexit a été présentée en Conseil des ministres le 27 mars dernier. S’en est ensuivie la publication de trois décrets et d’un arrêté, qui permettent d’avancer.

Madame la secrétaire d’État, pourriez-vous nous dire si l’ensemble des mesures législatives et réglementaires ont été prises ? Comment jugez-vous désormais le niveau de préparation de nos entreprises françaises à un no deal ?

Notre pays estime que « l’idée d’une extension longue, impliquant une participation du Royaume-Uni aux élections européennes, ne pourra être examinée que si le plan alternatif est crédible, soutenu par une majorité au Parlement britannique ».

Madame la secrétaire d’État, qu’est-ce qui pourrait aujourd’hui être caractérisé de plan alternatif crédible ? Comment croire qu’un tel plan est encore possible, alors que cette dernière semaine nous a prouvé le contraire ? Ne serait-ce pas un risque de discrédit pour l’Union européenne que d’accepter un report long aux conséquences déstabilisatrices incertaines pour le fonctionnement de l’Union comme pour les élections européennes de mai ?

Le Parlement britannique a dit « non » à un no deal, « non » à une union douanière avec l’Union européenne, « non » à un maintien dans le marché unique, « non » à un second référendum sur l’accord de retrait. Tout se passe désormais comme si le bateau naviguait sans capitaine à son bord.

Madame la secrétaire d’État, quelle position adoptera la France lors de ce sommet extraordinaire du 10 avril ?

En dehors du Brexit, ce Conseil européen était aussi destiné à débattre d’une position commune face à la Chine, afin de préparer le sommet bilatéral Chine-Europe du 9 avril, sur fond de visite d’État du Président chinois à Rome, à Monaco et à Paris.

Le défi est colossal, puisque jusqu’à présent l’Europe a surtout brillé par un manque de ténacité et un manque d’unité face à la Chine. Il ne s’agit pas de nier l’importance de la coopération sino-européenne ni de défaire ces relations. En effet, comme l’a rappelé le Président de la République lors de la conférence de presse conjointe avec le Président Xi Jinping et la Chancelière Angela Merkel, le 26 mars dernier, « le dialogue entre la Chine et l’Europe est devenu incontournable pour la définition des équilibres mondiaux, pour la préservation du multilatéralisme ».

Aujourd’hui, il importe surtout que nous nous donnions les moyens d’une coopération équilibrée et exigeante, d’une coopération respectueuse des intérêts européens et adaptée aux réalités du monde.

Nous devons nous donner les moyens d’une véritable cohésion entre États européens, car ce qui s’est passé dernièrement avec l’Italie ne peut que susciter des doutes néfastes et de l’inquiétude. À ce propos, notre groupe se félicite de la démarche inédite qu’a engagée le Président de la République en invitant Jean-Claude Juncker et Angela Merkel à une réunion commune avec le Président chinois. Un tel front uni est une manière de dire : « Nous sommes un État, certes, mais un État européen. »

Aujourd’hui, une prise de conscience s’opère, et c’est plus que louable.

Il y a, d’un côté, la Commission européenne, qui, avec son récent mémorandum, donne une impulsion à une posture plus ferme et plus réaliste, en exigeant un rééquilibrage dans les relations économiques avec l’Europe, plus de réciprocité dans l’accès aux marchés publics chinois, plus de transparence et moins de distorsions concernant les subventions d’État.

Il y a, de l’autre côté, un Parlement européen inquiet des « menaces pour la sécurité liées à la présence technologique croissante de la Chine dans l’Union » et qui exhorte les États européens à se coordonner.

Cette inquiétude à l’égard de l’entreprise Huawei et de sa place dans le déploiement de la 5G en Europe n’est pas dénuée de fondement. Ce sujet appelle à beaucoup de prudence.

Sur ce point, madame la secrétaire d’État, pourriez-vous nous dire comment la France accueille la communication de la Commission européenne portant sur une approche concertée en matière de sécurité des réseaux 5G ?

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