Intervention de Jacqueline Gourault

Réunion du 2 avril 2019 à 14h30
Collectivité européenne d'alsace — Exception d'irrecevabilité

Photo de Jacqueline GouraultJacqueline Gourault :

Monsieur le sénateur François Grosdidier, vous vous interrogez sur la constitutionnalité de l’octroi de compétences supplémentaires à la Collectivité européenne d’Alsace. Il s’agit d’un point de droit évidemment très important que le Gouvernement a pris pleinement en compte.

Il a ainsi saisi le Conseil d’État de la question, à Constitution constante, de la différenciation de la répartition des compétences entre collectivités d’une même catégorie.

Dans son avis du 7 décembre 2017, le Conseil d’État a considéré que certaines différences dans la répartition des compétences étaient possibles, à condition de présenter un caractère restreint, dans les limites fixées par le principe d’égalité tel qu’interprété par le Conseil constitutionnel.

Ce dernier a jugé, dans sa décision du 6 mai 1991 sur la loi instituant une dotation de solidarité urbaine et un fonds de solidarité des communes de la région d’Île-de-France, que le principe constitutionnel d’égalité applicable aux collectivités territoriales « ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l’objet de la loi qui l’établit ».

Or telle est précisément la situation de l’Alsace : les compétences supplémentaires que le projet de loi vise à confier à la Collectivité européenne d’Alsace sont justifiées par l’intérêt général et par la situation propre au territoire alsacien.

Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d’État l’a parfaitement reconnu en ce qui concerne la question des routes. Il a également estimé que les deux départements alsaciens étaient, en matière de langue et de culture régionales, dans une situation particulière.

De manière générale, l’avis du Conseil d’État ne mentionne en aucune manière une inconstitutionnalité des compétences spécifiques qu’il s’agit d’attribuer à la Collectivité européenne d’Alsace.

Vous indiquez par ailleurs, monsieur le sénateur, que certaines dispositions du projet de loi ne seraient pas normatives. Selon le Gouvernement, il est cependant important que le législateur reconnaisse les spécificités de la situation alsacienne.

Enfin, vous considérez que rien ne s’oppose à ce que les autres départements frontaliers ou ceux qui sont fortement marqués culturellement bénéficient de compétences similaires à celles qui sont confiées à la Collectivité européenne d’Alsace. Vous vous demandez pourquoi la situation de ces autres départements n’est pas réglée dans le cadre de ce projet de loi.

C’est pour une raison simple : le Gouvernement considère que l’exercice de compétences supplémentaires doit répondre à la demande et à la volonté des collectivités concernées. En outre, le présent projet de loi s’inscrit dans le cadre du regroupement de deux départements.

La révision constitutionnelle offrira des possibilités plus larges pour attribuer à une collectivité territoriale des compétences dont ne disposent pas toutes les autres collectivités territoriales de la même catégorie. Elle proposera donc d’autres possibilités de différenciation.

Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cette motion.

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