Intervention de Marie-Pierre de La Gontrie

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 3 avril 2019 à 14h05
Moyens mis en place pour faire face aux actes de violence et de vandalisme commis à paris — Audition de Mme Nicole Belloubet ministre de la justice garde des sceaux

Photo de Marie-Pierre de La GontrieMarie-Pierre de La Gontrie :

À écouter les chiffres que vous donnez, il semble que la loi dite anticasseurs était loin d'être indispensable aux poursuites...

Vous avez parlé de la nécessaire crédibilité des institutions ; or si nous avons beaucoup d'éléments sur les poursuites à l'encontre d'auteurs d'exactions, nous n'en avons pas concernant ce que certains reprochent - voyez que je suis très prudente dans les termes - aux forces de l'ordre. Les blessures constatées au cours des manifestations sont parfois très graves : certains ont perdu un oeil ou une main. Il n'est pas question ici, vous vous en doutez, de mettre en cause de quelque manière que ce soit la difficulté d'intervention des forces de l'ordre et leur engagement, mais nous avons des chiffres qui sont parfois un peu difficiles à concilier : vous avez parlé de 290 plaintes, mais sur la plateforme de l'IGPN, il y a eu 400 signalements et le ministre de l'intérieur, dans cette salle, devant cette commission, a parlé de 180 enquêtes judiciaires...

Vous avez dit à l'instant et à l'Assemblée nationale - car j'ai aussi lu votre intervention devant les députés - que les procureurs devaient poursuivent dès lors qu'il y avait plainte. J'en conclus donc que ce n'est pas forcément le cas lorsqu'il n'y a pas plainte. Nous en avons une illustration, me semble-t-il, à Besançon, avec les vidéos montrant incontestablement un manifestant - je ne parle pas des causes - frappé par un policier. Le préfet du Doubs a dit dans un premier temps qu'il ne s'était rien passé, pour finalement dire le contraire et qu'il saisissait l'IGPN. Fort bien, mais le parquet ne l'a pas fait. Avez-vous donné des instructions au parquet dans ce sens ? Je n'ai pas en effet connaissance de circulaires ou de dépêches concernant les épisodes mettant en cause - vous noterez ma prudence - les forces de l'ordre. Cela me semblerait pourtant nécessaire pour préserver, comme vous le dites, la crédibilité des institutions.

À Nice, une manifestante âgée de 73 ans - il semble que l'âge ait son importance - a été gravement blessée en chutant le 25 mars. Le fait que cette manifestation ait été interdite n'a, me semble-t-il, aucun lien avec la justification de l'accident. Le jour même, le procureur de Nice affirme que les policiers ne sont pas en cause, s'appuyant sur des images pour affirmer cela, et le président de la République reprend les mêmes propos. Il se trouve qu'ensuite des associations et la personne blessée finissent par établir qu'il n'en était rien, ce que le procureur reconnaît le 29 mars. Il y a eu à l'évidence un dysfonctionnement de la part du parquet, qui a communiqué d'abord pour dire blanc, puis pour dire noir. Quelle a été, madame la garde des Sceaux, votre initiative en direction de ce procureur ? Avez-vous saisi l'inspection générale de la justice ? La parole d'un procureur - phénomène nouveau : j'ai connu une période où les parquets ne s'exprimaient jamais - c'est important. Un procureur ou un préfet qui ne dit pas la vérité ou qui s'avance de manière imprudente, c'est un problème.

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