Je ne suis pas médecin. Je préciserai juste que les travaux de l'Inra sur les bartonnelles n'ont pas été réalisés dans un laboratoire vétérinaire de diagnostic mais dans un laboratoire de recherche, en collaboration avec la faculté de médecine de Marseille. En ce qui concerne les travaux sur les pourcentages d'organismes inconnus découverts dans les tiques (virus, parasites, bactéries), il ne faut pas confondre la découverte de morceaux de génomes inconnus et la découverte d'organismes inconnus. Les petits morceaux d'ADN détectés peuvent potentiellement appartenir au même organisme. En effet, on ne connaît pas le génome de tous ces organismes, il est donc normal de trouver des morceaux de génomes inconnus. En outre, lorsque l'on détecte un organisme dans une tique, cela ne signifie pas nécessairement que la tique sera capable de transmettre cet organisme.
En ce qui concerne l'étude que je mentionnais, selon laquelle on a 14 % de chances de contracter une maladie après une piqûre de tique infectée, je précise que ce pourcentage tient compte de la réponse du système immunitaire et du pourcentage de risque de transmission de la tique à l'individu.
Professeur Olivier Lesens. - Les International League of Dermatological Societies (ILDS) ont publié des recommandations, mais elles sont difficilement compréhensibles. Finalement, on conseille aux médecins de commencer par une antibiothérapie assez prolongée, puis d'aviser en fonction de l'expérience du médecin, en prescrivant éventuellement des traitements séquentiels. Quant à la durée, elle dépend de la réponse du patient. Je n'appelle pas cela un protocole thérapeutique...
Qui prescrit ces antibiothérapies séquentielles de longue durée ? Il faut parler des Lyme doctors qui sont des médecins généralistes. J'ai regardé qui avait signé la pétition du Nouvel Observateur : 80 % sont des homéopathes qui ont dans leur cabinet un certificat, portant la signature de Christian Perronne ou de M. Montagnier, qui les autorise à prescrire les examens et les traitements prolongés de la maladie de Lyme.
Professeur Christian Perronne. - Il s'agit d'un cas !
Professeur Olivier Lesens. - On connaît des cas similaires dans toutes les villes ! Les antibiothérapies donnent manifestement lieu à des dérives car elles sont données comme traitement à de nombreuses pathologies. C'est un mésusage de traitements qui risque d'accroître encore les risques d'antibiorésistance. Tout cela doit donc être encadré.
Des cas de traitements par voie veineuse, malheureusement, existent. Il faut les condamner, car ils sont dangereux pour les patients.
Professeur Yves Hansmann. - Certains propos qui viennent d'être tenus sont très éloignés de la démarche scientifique. On se base sur des hypothèses ou des théories, qui sont sans doute très intéressantes intellectuellement et qui méritent qu'on les examine, mais on en tire des déductions qui ne sont étayées par aucune étude. On fait des comparaisons avec la grippe ou la tuberculose, mais on ne sait pas si la maladie de Lyme est identique. Comment tirer des conclusions rigoureuses et scientifiques sur cette base ?
Il est exceptionnel de retrouver la présence de la Borrelia après un traitement. Il y a peu de comparaison possible entre l'homme et le singe. De plus, dans les études sur le singe, il n'est pas précisé si les Borrelia retrouvées étaient vivantes, ni si elles ont provoqué des symptômes particuliers. De même, on ne sait pas si un lien de cause à effet a été établi entre la présence de la bactérie et des symptômes cliniques. Pour ces raisons, on ne peut pas titrer d'interprétation des données qui ont été publiées. Quant à la présence d'un biofilm, elle a été prouvée in vitro, non chez les patients mais en laboratoire. Or beaucoup de bactéries ont des comportements différents en laboratoire et dans les êtres vivants parce que les conditions ne sont pas les mêmes.
Le PTLDS et le SPPT ne sont pas très bien définis. Il est difficile de les distinguer et les indications de la HAS ne sont pas très claires. Quant aux études sur les co-infections, il en existe plusieurs ! L'analyse de la littérature ne doit pas viser à trouver uniquement les articles qui confortent l'idée que l'on a. À Strasbourg, nous avons publié sur Babesia, sur Anaplasma, sur Borellia, sur Bartonnella, sur les encéphalites à tiques. Réduire les publications à ce qui nous intéresse est la meilleure manière de se tromper !
Docteur Raouf Ghozzi. - Je ne visais que les publications sur la Babesia, non les autres co-infections.