Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission des affaires économiques, mes chers collègues, voilà quelques mois, alors que nous étions rapporteurs de la loi Égalim, Michel Raison et moi-même avions déploré que le texte initial ait été détourné par l’adoption de nombreux articles additionnels à l’Assemblée nationale, au mépris de l’esprit originel du texte, dans la mesure où cela revenait à délaisser la question du revenu des agriculteurs au profit de questions alimentaires, ajoutant encore des charges à nos producteurs.
Le Conseil constitutionnel a confirmé, d’un point de vue juridique, que la plupart des articles ajoutés à la loi Égalim n’avaient pas de lien, même indirect, avec le format initial du projet de loi. Il a censuré près d’un quart du texte. Certains articles censurés avaient toutefois fait l’objet d’un travail approfondi et consensuel entre nos deux assemblées et répondaient à des attentes tout à fait légitimes et justifiées de nos territoires.
Les deux propositions de loi que nous examinons, celle de Marie-Pierre Monier et celle de Gilbert Bouchet, dont je salue le travail, ont justement pour objet de reprendre ces principales dispositions sur l’étiquetage et les mentions valorisantes.
La proposition de loi de Marie-Pierre Monier entend permettre l’étiquetage de certains fromages fermiers affinés en dehors de la ferme et renforce l’information du consommateur sur l’origine des produits qu’il achète, notamment les pots de miel et les bouteilles de vin. Enfin, tout comme la proposition de loi de Gilbert Bouchet qui a, en conséquence, été intégrée à ce texte, elle permet aux producteurs du Diois de diversifier leur production. Henri Cabanel, avec qui j’ai travaillé sur ces deux propositions de loi, précisera la position de la commission des affaires économiques sur ces deux points viticoles.
Sur la problématique des fromages fermiers, depuis un arrêt du Conseil d’État de 2015, il n’est plus possible pour les producteurs de fromages fermiers ne disposant pas de cave d’affinage au sein de leur exploitation de mentionner que leurs fromages sont fermiers. Cet arrêt met en péril de nombreuses petites structures de nos territoires en empêchant les producteurs de valoriser au mieux leurs produits.
Certes, il faut protéger la mention valorisante « fromage fermier » – c’est d’ailleurs l’objet de cette proposition de loi –, afin qu’elle ne soit pas dévoyée, mais ce n’est pas en écartant certains producteurs plutôt que d’autres, notamment les producteurs qui répondent aux critères de production des fromages fermiers, que nous y parviendrons. La commission proposera de revenir à la rédaction issue de la loi Égalim en ajoutant une sécurité supplémentaire, suggérée par notre collègue Pierre Louault, la mention du nom du producteur sur l’étiquette, afin de s’assurer que la production demeure bien sous la responsabilité directe du fermier.
Enfin, les miels donneront probablement lieu à un débat important. Il est anormal que le consommateur ne puisse pas connaître l’origine des miels qu’il achète. La directive européenne offre déjà la possibilité d’afficher tous les pays d’origine, mais elle n’est malheureusement pas ou peu appliquée en France.
C’est pourquoi nous proposons de l’inscrire explicitement dans la loi. Juridiquement, il est difficile d’aller plus loin, sauf à négocier à l’échelon européen un renforcement de la fiabilité des étiquetages des miels. Nous savons que ce point est très attendu des consommateurs.
Aussi, monsieur le ministre, afin de vous aider dans cette négociation qui, nous le savons, vous tient à cœur, la commission proposera une solution opérationnelle d’équilibre, à savoir l’affichage des pays en toutes lettres par ordre décroissant d’origine, sans aller pour autant jusqu’à la mention des pourcentages, pour des raisons pratiques et techniques.
Nous considérons que le consommateur disposera ainsi clairement des informations nécessaires et pourra identifier les origines d’un miel issu de mélanges et pourra faire son choix d’achat en toute connaissance de cause.