Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission spéciale, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord remercier et féliciter les rapporteurs, ainsi que la présidente de la commission, du travail considérable qu’ils ont réalisé sur ce projet de loi. Précis et constructif, ce travail a permis au Sénat d’amender largement le texte en première lecture et d’avancer une vision et des propositions.
Malheureusement, l’Assemblée nationale n’en a retenu, ou presque, que deux désaccords, portant sur le programme de cession de deux entreprises : la Française des jeux et Aéroports de Paris.
Il faut reconnaître, pourtant, que le message du Sénat a été partiellement entendu. Sur la Française des jeux, si l’Assemblée n’a pas retenu la solution du Sénat, elle a tout de même renforcé, dans sa deuxième version, le volet concernant la régulation du secteur des jeux. J’ai la faiblesse de penser que, si le Sénat n’avait pas émis le vote qui fut le sien en première lecture, cela n’aurait pas été le cas.
Le Sénat a été entendu partiellement, encore, s’agissant d’Aéroports de Paris, sur la question de la régulation. Il a fait valoir un certain nombre d’exigences et a voté, après un dialogue fructueux avec le ministre de l’économie et des finances, plusieurs amendements importants à l’initiative du rapporteur – que je veux saluer – instaurant une régulation. Nous avons eu un débat sur le bien-fondé de la privatisation elle-même, mais cela ne doit pas cacher cet apport majeur de notre assemblée, qui pose les principes d’une vraie régulation indépendante et qui encadre ce secteur pour l’avenir.
Aujourd’hui, mes sentiments sont malheureusement mitigés. Bien que je partage les objectifs de départ du texte, bien que le Sénat ait eu la volonté d’avancer sur les différentes mesures, malgré un vote en première lecture qui permettait de trouver des points de convergence, la nouvelle lecture à l’Assemblée nationale, chacun le sait, a balayé en très grande partie notre travail.
Le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises doit permettre aux entreprises françaises d’innover, de se transformer et de créer des emplois. Comment ne pas en partager les ambitions ? C’est parce que nous approuvions ses objectifs affichés et les principales dispositions qu’il proposait que le Sénat en général, et le groupe Union Centriste en particulier, a abordé son examen avec bienveillance. Nous avions la volonté d’améliorer ou de compléter les mesures concrètes qu’il contenait.
L’échec de la commission mixte paritaire portait sur quelques points durs du texte, principalement la Française des jeux et Aéroports de Paris, nous pouvions toutefois garder espoir quant à la reprise des positions du Sénat sur le reste du texte, que le Gouvernement aurait pu soutenir s’il l’avait souhaité.
Force est de constater que les députés sont largement revenus à leur rédaction de première lecture sur les principales mesures du texte. Les points d’accroche les plus symboliques sont connus : l’évolution du stage préalable à l’installation des artisans, le doublement du seuil de cinquante à cent salariés, le refus d’un report à 2021 de la réforme du contrôle légal des comptes sans en modifier l’équilibre global, ou le rétablissement de la faculté, pour l’Institut national de la propriété industrielle, de s’opposer à la délivrance d’un brevet dépourvue d’activité inventive.
En ce qui concerne la Française des jeux, les députés ont réinstauré la privatisation, tout en améliorant légèrement la régulation du secteur. Ce n’est sans doute pas suffisant, mais cela va dans le bon sens.
En ce qui concerne Aéroports de Paris, je voudrais d’abord dire ma déception que le Sénat n’ait pas pu se saisir de cette question autrement qu’en termes politiques. C’était, à mon sens, le risque majeur, s’agissant d’une entreprise emblématique connue de tous et portant un nom qui parle au cœur des Français. J’avais eu l’occasion d’alerter le Gouvernement sur ce point.
Soyons clairs, il peut y avoir des entreprises publiques ou privées bien ou mal régulées dans ce type de secteurs, qui est largement concurrentiel, contrairement à ce que j’ai entendu. Certes, le marché primaire, celui de la destination, ne l’est pas pour ceux qui sont à deux ou trois heures de l’aéroport. Mais, pour le reste, nous sommes en compétition avec les plus grands hubs du monde.
Ensuite, il faut poser la question en se rappelant que le capital de cette entreprise a été ouvert en 2006 – c’est la droite qui en est à l’initiative. À l’époque, une large partie des actions ont été introduites en bourse. Dès lors, les choses étaient écrites, me semble-t-il.
Ce système présente un certain nombre de désavantages : aujourd’hui, il n’est pas bien régulé, et, on le voit bien, les décisions sont prises au plus haut niveau par les pouvoirs publics, qu’ils aient – ou non – une claire conscience des enjeux très techniques du secteur aéroportuaire.
Il convient de permettre aux compagnies aériennes d’améliorer leurs services. Certes, la qualité de service s’est améliorée, mais elle est sans doute perfectible. Enfin, il faut faire en sorte que cette opération se déroule dans des conditions tarifaires acceptables. Or les compagnies rappellent que, de ce point de vue, le système actuel, qui est défendu sur certaines travées, n’est pas vertueux : il incite au surinvestissement, et les redevances sont particulièrement élevées. Sur ce dernier point, nous sommes montrés du doigt.
Il fallait travailler à la réforme de ce système, mais j’aurais aimé que le Gouvernement adopte une approche différente : qu’il réaffirme son ambition pour le secteur aéroportuaire et aérien français, l’un des premiers au monde, qui fait notre fierté ; qu’il travaille beaucoup mieux lors des Assises nationales du transport aérien – le travail a été mal fait, car des mesures de compétitivité auraient dû être prises – ; et qu’il réaffirme deux manières d’agir pour donner un avenir à Aéroports de Paris, soit en améliorant la régulation dans le secteur public, soit en procédant à une privatisation, qui aura l’avantage d’apporter des capitaux à cette entreprise et de lui donner plus de souplesse, notamment à l’étranger, mais en régulant mieux.
Toutes les compagnies mondiales l’affirment, et tout un chacun qui veut bien s’intéresser à ce sujet le sait, dans les deux cas, que l’entreprise soit privée ou publique, il est possible de réguler. Aujourd’hui, l’entreprise n’est pas bien régulée et, demain, elle le sera plus, me semble-t-il, même si je n’aurais pas forcément proposé cette mesure.
Que l’on sache que le Sénat continue à aborder ce type de questions en disant les choses telles qu’elles sont, et non pas comme on souhaiterait qu’elles le soient politiquement, pour faire le procès du Gouvernement et se dédouaner des privatisations qui ont eu lieu.
À cet égard, je rappelle que le processus de privatisation de l’aéroport de Toulouse a été lancé sous la gauche, au travers d’une loi de M. Montebourg, qui a été, on le sait, mal votée et mal exécutée. En revanche, la privatisation des aéroports de Nice et Lyon, qui a été également engagée sous le précédent gouvernement, …