Durant ces dernières années, l'OCDE a analysé la qualité des finances publiques dans leur ensemble. Nous sommes partis non pas des réformes individuelles mais du volume total des dépenses publiques, des recettes, de la manière dont elles sont obtenues, et de la répartition des dépenses. Nous avons examiné comment des changements, parfois importants, depuis les années 1970 ont influencé la dynamique de croissance des pays de l'OCDE et la répartition du revenu disponible des ménages après la fiscalité et les transferts. Nous avons donc une approche rétrospective, en nous appuyant sur la comptabilité des pays de l'OCDE.
Il n'y a pas de relation entre la taille des administrations publiques et la croissance, mais entre la taille de ces administrations et leur efficacité. Lorsque le niveau d'efficacité des dépenses publiques est élevé - d'après un indicateur de la Banque mondiale - la taille importante de l'État n'est pas un obstacle, par exemple dans les pays scandinaves. Par contre, lorsque l'efficacité des dépenses publiques est modérée, la taille de l'État importe - comme en France ou dans les pays du Sud de l'Europe.
Le débat sur la fiscalité fait partie du débat global sur les finances publiques. Lorsque l'impôt baisse, nous supposons qu'il est compensé par une augmentation proportionnelle de tous les autres impôts et inversement. Nous avons divisé les recettes publiques en une dizaine de catégories : contributions sociales, impôt sur le revenu, y compris du capital, impôt sur les sociétés, impôt sur les successions, impôts sur la fortune, taxes environnementales, à la consommation, sur l'immobilier - taxes d'habitation et foncière et taxe sur les transactions. La plupart de ces impôts ont des conséquences plus ou moins distorsives, au regard de leurs incidences sur les inégalités et donc sur la croissance. L'impôt le moins distorsif est la taxe foncière dans l'ensemble des pays de l'OCDE, payée surtout par les propriétaires. L'impôt ayant un effet le plus distorsif, ayant des conséquences négatives pour la croissance, est l'impôt sur le patrimoine net - ISF en France. Cet impôt, largement utilisé dans les années 1970 et 1980, a progressivement disparu en Autriche, au Canada, au Danemark, en Finlande, en Allemagne, en Islande, en Irlande, en Italie, aux Pays-Bas et en Suède. Il produisait également de faibles recettes. Par une méthode différente, l'ordre de grandeur est proche du chiffre de M. Didier. Si on réduit les recettes tirées de cet impôt de 0,1 % de PIB, au bout de 10 ans, on pourra avoir 1 % de PIB en plus, ce qui correspond à un accroissement graduel annuel qui est un peu plus de 0,06 point. Cet effet est également lent à intervenir - 10 ans pour la moitié des conséquences.
Il y a un lien entre cet impôt et l'inégalité de distribution de revenus - ce qui n'était pas évident au départ, puisqu'il s'agit d'un impôt sur le patrimoine. Cet impôt pénalise la croissance, sans pour autant avoir d'effet sur la correction des inégalités.
Ce qui reste de l'ISF, à savoir la taxation de la part immobilière, est difficile à évaluer. C'est un impôt spécifique, difficilement comparable avec les impôts de nos voisins. Les impôts payés de manière récurrente sur la valeur du patrimoine immobilier sont peu distorsifs, et ont un coût sur la croissance faible. Il faudrait aussi détecter l'impact de l'effet de seuil.
Le résultat le plus important de nos études, même s'il n'est pas directement lié à votre sujet, concerne la fiscalité effective sur le travail. Elle est pour la France parmi les plus élevées des pays de l'OCDE, pour tous les revenus, et a des effets extrêmement forts sur la croissance et la distribution des revenus.