Nous ne pouvons pas forcer les gens à nous suivre, mais nous essayons de montrer le chemin, notamment à la Fédération. Des femmes peuvent s'imposer dans des postes à responsabilités. Je pense que nous ouvrons la voie au-delà du milieu sportif.
En effet, la France a gagné la Coupe du Monde, mais l'effet n'a pas perduré. Avons-nous vraiment une culture du sport en France ? La question reste ouverte. Je ne pense pas que nous soyons leaders en termes de considération pour le sport français. Pourtant, nous avons des ambitions élevées, par exemple pour Paris 2024. Le sport apporte énormément à la société. Le football a démontré qu'il pouvait rassembler un peuple et calmer les confrontations. La Côte d'Ivoire, par exemple, a remporté la Coupe d'Afrique. Lorsque Didier Drogba s'est adressé à son peuple en tant que capitaine de l'équipe de football, les conflits internes ont cessé momentanément. Le sport peut donc faire évoluer les mentalités.
Pouvons-nous changer la mentalité française autour du sport et montrer que le sport est vecteur d'ascension sociale ? Ou voulons-nous garder l'idée que le sportif est une personne issue des banlieues qui devient riche du jour au lendemain et qui n'a pas de valeurs ? Il nous revient de choisir, de mettre en avant nos sportifs et nos politiques sportives et de montrer ce que le sport est capable de faire pour notre société.
La Fédération s'investit énormément dans des projets sociétaux. Nous nous rendons dans les écoles pour parler du football et inspirer les jeunes. Nous leur disons qu'ils peuvent faire du football non pas pour gagner de l'argent, mais pour devenir de meilleurs citoyens. Ils apprennent à travailler et à habiter ensemble. Nous menons des projets sur la citoyenneté, notamment avec le Fondaction du football. Dans les clubs, nous parlons d'homophobie ou de nutrition. Nous initions nos jeunes à la musique, nous les ouvrons à la société. Certains de nos jeunes interviennent auprès de la Croix-Rouge.
Il est vrai que nous devrions communiquer davantage sur ces sujets, car cela donnerait une autre image de notre sport. Toutefois, les médias ne s'y intéressent pas. Ils se concentrent sur les transferts de joueurs et les sommes d'argent phénoménales qui sont engagées. Il nous incombe donc de montrer ce que nous faisons pour les jeunes au quotidien. N'oublions pas que le sport est un vecteur d'ascension sociale. J'allais aux États-Unis pour passer un bachelor, mais j'ai finalement obtenu un master parce que j'ai vu de jeunes sportifs bénéficier de bourses d'études grâce au sport. Durant leur parcours, certains jeunes réalisent qu'ils ne sont pas d'assez bons sportifs et décident de poursuivre leurs études. Le sport leur a permis d'aller plus loin.
Ma mère est femme de service dans un établissement et mon père travaille à la sécurité du château de Versailles. Sans le football, j'aurais peut-être eu comme seule option d'aller à l'université et de travailler dans l'administration. C'est grâce au football que je suis arrivée là où je suis aujourd'hui.
Le football m'a permis de développer mes ambitions. Je suis ambassadrice à l'UEFA et j'interviens à l'international. J'ai la chance de parler plusieurs langues, comme l'anglais, l'espagnol et le portugais, puisque j'ai eu l'opportunité de côtoyer des joueuses brésiliennes. Je fais également partie des FIFA Legends. Grâce à l'UEFA, je me suis rendue récemment dans des camps de réfugiés en Jordanie. Tout cela, je le dois au football et au sport. Parmi les sportifs, il y a des gens qui font du bien. Le football a permis à certains de s'élever au niveau social. Toutefois, les budgets qui sont alloués au sport diminuent. Pourtant le sport nous rassemble. Il permet à la société de souffler à certains moments, mais cela n'est pas valorisé en France.
La Fédération française de football est active dans la société et nous devons le montrer davantage. Nous devons aussi montrer l'exemple aux autres fédérations. Cela constitue l'un de nos axes de travail.