Monsieur le secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur, je veux aujourd’hui vous parler de Luciano, artiste de reggae jamaïcain mondialement connu.
Comme moi, Luciano vient de cette belle et grande région, la Caraïbe, qui fit autrefois la richesse des puissantes métropoles. Une communauté de nations de plus de 40 millions d’habitants qui tente depuis quelques années de poser les bases d’une coopération solide.
Luciano et ses musiciens devaient venir en Martinique pour un concert très attendu, le 31 mars dernier. Mais ce jour-là, le concert n’a pas eu lieu : les musiciens n’ont pas obtenu leurs visas dans les temps. Pis, ils ont attendu plus d’un mois leurs passeports sans savoir quand ceux-ci leur seraient renvoyés, assignés à résidence par la force des choses, par la lenteur du traitement de leur dossier.
Depuis un peu plus d’un an, nos voisins jamaïcains et la plupart des ressortissants des grandes Antilles doivent passer par le consulat général de Washington pour venir chez nous.
Comme bien d’autres consulats, celui de Washington a confié le traitement des demandes de visas à un prestataire privé, tristement dénommé VFS.
Ce prestataire privé, qui coûte cher à ceux qui veulent venir chez nous, ne répond ni aux mails ni aux appels téléphoniques, et ne permet pas de suivre correctement les demandes. Il décourage les visiteurs et tue à petit feu toute tentative de coopération ou d’échanges économiques, culturels ou touristiques.
Faciliter la délivrance de visas pour des courts séjours dans notre territoire ne provoquera pas, je vous rassure, un afflux massif de Jamaïcains en Martinique ! Et notre territoire ne fait pas partie de l’espace Schengen.
Les postures coloniales ont tout fait pour nous faire tourner le dos à ce bassin légitime, cette « géographie cordiale » si bien nommée par le poète. Le chemin inverse est long et compliqué. Mon pays a tout mis en œuvre, parfois à marche forcée, pour intégrer les grandes instances caribéennes. Il est désormais membre de l’Association des États de la Caraïbe, l’AEC, et de l’Organisation des États de la Caraïbe orientale, l’OECO, mais tout cela est vain si nos voisins sont si contraints.