Intervention de Louis Mermaz

Réunion du 14 septembre 2006 à 15h00
Prévention de la délinquance — Article 2

Photo de Louis MermazLouis Mermaz :

Le code de l'action sociale et des familles prévoit trois types d'action relevant de la responsabilité du département : des actions tendant à permettre aux intéressés d'assurer leur propre prise en charge et leur insertion sociale, des actions dites de prévention spécialisée auprès des jeunes et des familles en difficulté ou en rupture avec leur milieu, enfin des actions d'animation socio-éducatives. Le Gouvernement propose d'ajouter une quatrième compétence, et c'est ce que nous récusons.

La suppression de l'article 2 se justifie pour trois raisons.

Premièrement, l'extension du champ des compétences du département en matière de prévention de la délinquance représenterait un glissement du champ éducatif vers le champ sécuritaire, au risque de dénaturer la mission d'action sociale des conseils généraux.

Ce n'est pas parce que le département exerce des compétences à la lisière de la prévention de la délinquance qu'il doit nécessairement recourir à des actions en ce domaine où il n'est pas directement compétent ; cela ne relève pas de sa mission.

La protection de l'enfance et l'action sociale font l'objet d'une législation et de procédures spécifiques, dont la responsabilité incombe aux conseils généraux dans un maillage étroit avec les autorités judiciaires, les travailleurs sociaux et les associations. La présence de ces deux dernières catégories d'acteurs nous rappelle d'ailleurs que la prévention spécialisée est une forme d'action éducative née en 1945. En d'autres termes, la prévention spécialisée s'inscrit dans le prolongement de l'action éducative, et non de la prévention à vocation répressive.

Par ailleurs, les missions de protection de l'enfance ne doivent pas être confondues avec la prévention de la délinquance. Avec cette nouvelle mesure, le département pourrait participer à toutes formes d'actions de prévention de la délinquance, y compris celles qui ne revêtiraient plus un aspect social. Les animateurs de la prévention spécialisée prédisent que de nombreuses associations seraient déconventionnées et leurs actions remises en causes dans le cadre d'appels d'offre aujourd'hui obligatoires au profit d'associations qui seraient retenues parce qu'elles auraient inscrit dans leur cahier des charges, prioritairement, un objectif de sécurité et de contrôle.

Deuxièmement, cette spécificité en matière d'action sociale doit être préservée et confirmée, sauf à créer des incohérences et des confusions hasardeuses entre le rôle du département et celui des communes. Lorsque les institutions se mettent à croître démesurément, c'est mauvais signe : à force d'ajouter des compétences, des organismes, à force de compliquer, de créer de nouvelles strates, on rend le dispositif illisible. C'est cette confusion que nous ne cessons de dénoncer depuis le début de ce débat.

Troisièmement, la possibilité de délégation des compétences du département en matière d'aide sociale existe déjà, mais elle reste peu utilisée en direction des communautés urbaines ou des communautés d'agglomération, sinon de façon exceptionnelle en dehors de Paris.

Pour toutes ces raisons, nous souhaitons la suppression de l'article 2.

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