Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame, monsieur les rapporteurs, mes chers collègues, c’est un honneur pour moi d’intervenir après Jérôme Bignon dans cette discussion. Cela montre bien non pas la forme de consensus, mais la complémentarité qui a régné durant l’élaboration de cette loi et qui va perdurer pendant nos débats.
Ce texte est celui des engagements tenus, par le chef de l’État et le Gouvernement, par le monde de la chasse, mais aussi par les environnementalistes. C’est le texte de tous les acteurs de la protection des écosystèmes. À ce titre, il mérite d’être salué.
Voté à la quasi-unanimité à l’Assemblée nationale, le présent projet de loi va permettre d’envisager des pratiques plus rationnelles et une meilleure protection de l’environnement.
C’est un projet de loi à la fois ambitieux, courageux et visionnaire ; il est équilibré à l’égard de l’ensemble des partenaires du monde rural. Il s’inscrit dans un pari audacieux, auquel j’adhère totalement, car il s’agit d’assurer et d’assumer le développement de la chasse française dans tous nos territoires ruraux.
Il s’agit également de porter l’idée que la chasse doit s’adapter, se moderniser, s’ouvrir pour gérer plus efficacement la faune sauvage, responsabiliser les gestionnaires des territoires, partir à la reconquête de l’opinion publique et promouvoir une chasse durable.
Devant tous les dirigeants de la chasse française réunis à l’occasion de leur congrès en 2017, le chef de l’État Emmanuel Macron, qui était alors candidat et que j’accompagnais, avait affirmé avec bon sens et conviction : « La chasse n’est ni un sport ni un loisir, mais un mode de vie. » Mais, soyons clairs, mes chers collègues, et je tiens à le préciser ici, ce n’est pas une loi « chasse » !
Il y a près de vingt ans, à la suite d’une très grande consultation, j’ai écrit un rapport contenant 110 propositions pour une chasse apaisée et responsable. Il a abouti à la loi du 24 juillet 2000, qui a fait du droit de chasse un droit positif confortant toutes les pratiques de chasses, accordant à la Fédération nationale des pouvoirs dont elle ne disposait pas jusque-là et reconnaissant la responsabilité de chacun.
Cette loi a permis de nombreuses avancées, aujourd’hui reconnues par le monde cynégétique.
Madame la secrétaire d’État, j’en profite pour saluer votre engagement et celui de tous les partenaires – je remercie également la commission – sur ces sujets qui me tiennent à cœur, ainsi que votre prédécesseur Sébastien Lecornu, avec lequel nous avons travaillé.
La création de l’OFB répond à ces attentes, puisque cet office permettra de faire travailler ensemble le monde de la chasse et celui de l’environnement. Les expertises sont rapprochées, et les pouvoirs de la police de l’environnement renforcés.
Mme la secrétaire d’État les ayant évoqués, je ne m’attarde pas sur les cinq piliers sur lesquels repose l’office – je pense notamment aux pouvoirs de police, à la connaissance des espèces et à la politique de l’eau. Je veux en retenir que deux.
Le premier est la mission de police, qui correspond à un engagement du chef de l’État et à une demande très forte du Gouvernement, des maires, des territoires ruraux et des agents de l’environnement qui veulent une police rurale aux missions bien définies et disposant des moyens juridiques et financiers nécessaires à l’exercice de ses missions.
Je le redis, c’est une attente réelle des territoires et de leurs acteurs. Le monde de la chasse est très attaché à cette police. Il fait d’ailleurs preuve de responsabilité en termes de mission sur les espèces, de police et de sécurité. Tout le monde peut en convenir, la sécurité n’est pas absente de nos pensées. Nous pourrons d’ailleurs soutenir les amendements du Gouvernement qui vont en ce sens.
Mon deuxième point, moins facile à évoquer, concerne la gestion adaptative des espèces. J’entends déjà le bruit gronder en dehors de cet hémicycle. Il s’agit pourtant d’une notion de bon sens, nous le savons tous ici. Chacun veut la survie des différentes espèces, et personne ne souhaite mettre à mal les espèces menacées.
La gestion adaptative doit s’appliquer seulement aux espèces qui posent des problèmes, soit parce que les populations diminuent soit parce qu’à l’inverse elles augmentent en causant souvent des dégâts sur leur environnement, et plus globalement sur la biodiversité.
Il faut brise le tabou selon lequel les espèces, qu’elles soient protégées ou chassables, demeureraient pour toujours intouchables. Il faut mettre fin à l’effet cliquet, qui veut qu’une espèce non chassable aujourd’hui le soit indéfiniment.
La gestion adaptative doit s’appliquer autant à l’oie cendrée qu’au cormoran ou à la tourterelle des bois, une espèce actuellement menacée. J’ajoute que cette gestion doit concerner toutes les espèces en danger, et pas seulement les espèces chassables. Les États-Unis et le Canada gèrent parfaitement cette situation, avec une méthode adaptée et éprouvée depuis plus de vingt ans.
Madame la secrétaire d’État, je sais tous les efforts que vous avez déployés auprès de la Commission européenne. Il est regrettable que le Conseil d’État n’ait encore rien compris, alors que même le commissaire européen à l’environnement a écrit, pour la première fois en vingt ans, que l’on pouvait chasser les oies en février sans aucun problème.
Durant la discussion de ce texte, je sais que nous allons revenir sur de nombreux sujets : les dégâts de gibier, en forêts ou ailleurs, déjà très bien assumés aujourd’hui par de nombreuses fédérations, l’engrillagement, l’agrainage. Dans ces domaines, je tiens à le dire ici, les fédérations de chasse font des propositions que nous allons examiner dans un souci de sagesse, tout en gardant à l’esprit notre objectif de clarification, d’efficacité et de responsabilité.
Enfin, je souhaiterais aborder la question du financement, qui a déjà été évoquée. L’État doit se recentrer sur ses compétences régaliennes, et il est normal de faire confiance aux fédérations qui sont déjà chargées de missions de service public. Elles les gèrent pour un coût moins élevé et avec davantage d’efficacité que la puissance publique.
J’ai l’intime conviction que la réforme sera totalement financée et que l’État assumera ses choix. Mais comme beaucoup d’entre vous, mes chers collègues, je pense que les flux croisés qui sont indispensables pour cette première saison doivent faire l’objet d’une renégociation rapide pour la prochaine loi de finances.
Pour être très clair, j’ai toujours pensé que l’argent de la chasse devait payer la chasse, que l’argent de l’eau devait d’abord payer l’eau et que les missions régaliennes de police rurale et d’expertise sur la biodiversité terrestre devaient être prises en charge de l’État.
En conclusion, mes chers collègues, alors que des esprits chagrins pensent encore que le Président de la République et le Gouvernement ne savent pas négocier les réformes avec les corps intermédiaires, notamment ruraux, nous avons la démonstration du contraire avec ce projet de loi qui a été bien négocié.