Intervention de Christiane Demontès

Réunion du 14 septembre 2006 à 15h00
Prévention de la délinquance — Article 5

Photo de Christiane DemontèsChristiane Demontès :

Avec l'examen de l'article 5, nous abordons un point qui pose un énorme problème : celui du secret professionnel, du secret partagé et du partage d'informations.

En fait, cet article remet en cause, comme cela a déjà été dit, le secret professionnel, en établissant une confusion entre les missions de sécurité, de justice et de cohésion sociale.

Monsieur le ministre, selon vous, cet article permet la coordination. Mais, non, il sème la pagaille ! Il instaure, comme M. Mercier l'a fort bien dit, une confusion s'agissant des rôles respectifs du maire et du président du conseil général. Il remet en cause l'un des fondements du travail social, le secret professionnel, élément indispensable pour sauvegarder un espace de confiance nécessaire entre les familles et les professionnels.

Par la création de l'article L. 121-6-2 du code de l'action sociale et des familles, vous organisez la levée de ce secret professionnel par une obligation d'information du maire, quand la gravité des difficultés sociales, éducatives ou matérielles d'une personne ou de plusieurs personnes composant une même famille est constatée par un travailleur social et appelle l'intervention de plusieurs intervenants. Dans ce cas, le coordonnateur désigné par le maire sera autorisé à lui révéler les informations confidentielles qu'il détient.

Vous instaurez ainsi, monsieur le ministre, une véritable confusion des pouvoirs, qui ne satisfera ni les familles, qui se sentiront trahies et qui risqueront de s'éloigner durablement des professionnels, ni les professionnels eux-mêmes, qui se sentiront dévalorisés et mis en cause, ni les maires, que vous placez dans une situation insupportable.

Voilà quelques semaines, au cours du débat sur le projet de loi réformant la protection de l'enfance, notre assemblée faisait du président du conseil général le chef de file de la protection de l'enfance. M. le ministre délégué à la sécurité sociale déclarait alors : « D'ores et déjà, je peux cependant vous indiquer qu'aucun autre texte ne prévoit un partage d'informations au service de ce que vous appelez un « contrôle social », impliquant la communication aux élus d'informations couvertes par le secret professionnel, en dehors des cas prévus explicitement ». Sans doute auriez-vous pu ajouter : « Je suis tenu dans l'ignorance de ce qui se trame place Beauvau » ! Mais nous avons l'habitude de telles situations !

En tout état de cause, les dispositions introduites par l'article 5 contreviennent à l'exercice et à l'efficacité même du travail social.

Comment envisager sérieusement que des familles connaissant de grandes difficultés se confient aux travailleurs sociaux dès lors qu'elles sauront que la loi ne garantit plus la confidentialité ? Cela a été dit, le travail social demande du temps, de la confiance et de la discrétion. Tout cela est bien souvent assujetti à l'existence du secret professionnel. Si, dans certains cas, nous pensons que le maire doit effectivement être informé, et il l'est généralement, il n'est pas nécessaire qu'il ait en sa possession l'ensemble des informations relevant du secret professionnel.

Au contraire, il doit se prévaloir d'une indépendance, tant vis-à-vis des travailleurs sociaux...

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