Monsieur le sénateur, il n’y a ni puissance ni projet politique sans monnaie. L’euro doit être l’instrument de la puissance politique européenne ; sinon, il n’aura pas d’avenir.
Toute notre discussion d’aujourd’hui montre bien le chemin qu’il faut suivre. Il faut une incarnation : le ministre des finances de la zone euro. Il faut des instruments complémentaires : l’union bancaire, l’union des marchés de capitaux, le budget de la zone euro. Enfin, il faut une ambition – n’ayons pas peur d’employer ce mot –, celle de faire de l’euro, demain, une monnaie de réserve équivalente au dollar. C’est possible ! Nous avons en effet le marché de consommateurs le plus riche de la planète, même si nous avons quelque peu tendance à l’oublier. Les 500 millions de consommateurs européens font le marché le plus riche et le plus attractif du monde.
Nous avons une monnaie solide et stable, l’euro. Il nous appartient seulement, à présent, de prendre un certain nombre de décisions très concrètes.
Premièrement, je proposerais volontiers que les facturations se fassent désormais en euros, et non plus en dollars, pour les entreprises européennes qui exportent. C’est un moyen de faire de l’euro une monnaie de référence sur la scène internationale.
Deuxièmement – nous avons évoqué avec M. Masson les contours de cette proposition –, il faudrait avoir un instrument financier doté de réserves en euro qui nous permettraient de financer les échanges commerciaux, y compris avec des États placés sous sanctions extraterritoriales américaines. L’euro peut être un outil d’autonomie, un outil d’indépendance politique, mais il faut pour cela cette institution financière totalement indépendante.
Troisièmement, il faut être capable de développer le commerce en euro, en ayant conscience de ce qui se passe à travers le monde. Le montant total des investissements de l’Exim Bank chinoise en Afrique est supérieur, depuis deux ans, à celui des investissements de la Banque mondiale. Cela dit bien le renversement de puissance que l’on peut observer aujourd’hui.
Face à cela, notre intérêt est de faire de l’euro une monnaie de référence internationale. La Commission européenne a formulé des propositions en ce sens ; nous les soutenons. J’y ajoute celles que je viens d’avancer : la facturation en euros, l’outil financier indépendant et le développement des échanges commerciaux sur la base de notre monnaie commune.