Intervention de Jean-Michel Houllegatte

Réunion du 30 avril 2019 à 14h30
Quelle politique de lutte contre la pollution et de recyclage du plastique et plus généralement quelle utilisation du plastique en france — Conclusion du débat

Photo de Jean-Michel HoullegatteJean-Michel Houllegatte :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, il me revient donc de conclure, au nom de mon groupe, ce débat fort utile, qui fut riche d’enseignements. Il aura permis de souligner, s’il en était encore besoin, l’urgence de la situation, et donc la nécessité d’agir rapidement pour éviter une catastrophe écologique et sanitaire, comme nous l’a rappelé, avec beaucoup d’émotion, notre collègue Angèle Préville.

Rappelons les chiffres : selon un rapport de mars 2019 du WWF, il a été produit dans le monde autant de plastique entre 2000 et 2016 qu’entre 1950 et 2000. Plus de 310 millions de tonnes de déchets plastiques ont été produites en 2016, dont un tiers se sont retrouvées dans la nature, les océans recueillant 150 millions de tonnes de plastique. Si rien n’est fait, la production mondiale de déchets plastiques pourrait augmenter de plus de 40 % d’ici à 2030 et la quantité accumulée dans l’océan pourrait alors doubler. En 2050, il pourrait ainsi y avoir plus de plastique que de poisson dans la mer !

Rappelons également que la France a encore de gros progrès à faire en matière de recyclage, puisque seulement 22 % des plastiques y sont recyclés, contre 31 % à l’échelle européenne.

Une prise de conscience semble néanmoins naître dans l’opinion. Les discours se multiplient pour bannir les plastiques superflus et réduire l’usage unique. Une sorte de plastique bashing se développe de plus en plus, avec lequel, comme l’a indiqué notre collègue Patrick Chaize, il faut toutefois prendre ses distances.

Certes, le Gouvernement a pris un certain nombre de mesures. Ainsi, madame la secrétaire d’État, le pacte national sur les emballages plastiques que vous avez signé le 21 février dernier va dans le bon sens. Les entreprises et les grands groupes signataires s’engagent en effet à cesser d’utiliser le polychlorure de vinyle, ou PVC, pour la fabrication des emballages ménagers, commerciaux et industriels d’ici à 2022, et à éliminer les emballages plastiques problématiques ou inutiles d’ici à 2025, à commencer par le polystyrène expansé.

Ce pacte fixe également l’objectif de 60 % d’emballages plastiques effectivement recyclés à l’horizon 2022 et d’incorporer en moyenne 30 % de matières plastiques recyclées dans les emballages.

Mais ces mesures semblent insuffisantes eu égard aux enjeux. L’approche volontariste sur laquelle repose le pacte et l’absence de contraintes risquent d’en limiter les effets. Aucun objectif chiffré n’est donné, en outre, quant à la réduction de la quantité d’emballages à la source. Par ailleurs, le recyclage ne peut être la seule solution apportée au problème, d’abord parce que le recyclage du plastique n’est pas infini : contrairement au verre, au papier et au métal, les plastiques ne se biodégradent pas. Ensuite, parce que le meilleur déchet, c’est avant tout celui que l’on ne produit pas, il faut intervenir autant que possible à la source, en produisant moins de plastique.

L’aspect international du problème doit également être pris en compte. S’il est vrai que les principales sources du plastique des océans sont les pays en voie de développement, de nombreux autres pays, dont la France, exportent une partie de leurs déchets plastiques vers ces régions. C’est aussi en raison du caractère transnational du phénomène que de nombreuses organisations demandent la mise en place d’un traité international juridiquement contraignant pour enrayer cette pollution.

Il existe, me semble-t-il, un large consensus sur nos travées concernant ce sujet. Nous souscrivons, madame la secrétaire d’État, aux trois piliers que vous avez présentés : la suppression des plastiques inutiles, le recyclage de 100 % des plastiques utiles et la préparation, par l’innovation, de l’« après-plastique ».

Nous souhaitons que ce débat permette d’enrichir la feuille de route sur l’économie circulaire et vous pouvez compter sur notre implication, ainsi que sur celle des collectivités locales, dans sa mise en œuvre.

C’est sans doute toute une palette de mesures cohérentes et ambitieuses qu’il faut mettre en œuvre : des mesures coercitives, certes, mais aussi des mesures incitatives.

Au-delà, vous avez évoqué avec force, madame la secrétaire d’État, l’outrance de notre société de consommation. C’est donc un autre modèle de consommation et de développement que nous devons promouvoir. Sachez que nous prendrons toutes nos responsabilités à cet égard !

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