Monsieur le président, monsieur le président et monsieur le rapporteur de la commission des lois, mesdames, messieurs les sénateurs, le 21 février, le Conseil constitutionnel a rendu une décision dans laquelle il fait part de ses observations relatives aux dernières élections législatives.
Cette décision était riche d’enseignements et de propositions pour améliorer notre droit électoral.
Nous savons effectivement, et vous le savez bien en qualité d’élus, que le droit électoral recèle parfois de petites zones d’ombre involontaires, qui peuvent semer le trouble chez les électeurs, mais aussi chez les candidats, et poser des difficultés au juge électoral. Je ne doute pas que vous êtes nombreux ici à vous être demandé, à chaque élection, si l’échéance était bien fixée au vendredi ou au samedi minuit. Je ne voudrais pas faire état de mon expérience personnelle, mais un doute m’a souvent assailli au moment de répondre à cette question !
Les remarques du Conseil constitutionnel pour améliorer notre droit devaient attirer notre attention et méritaient d’être inscrites dans le droit. Je souhaite donc remercier Alain Richard de cette initiative, comme du travail remarquable qu’il a mené autour de ces textes. Je connais, monsieur Richard, votre engagement constant pour la clarification du droit.
Je reviens maintenant plus précisément sur le contenu des propositions de loi et sur ce qui me semble constituer leurs avancées les plus significatives. J’en vois deux principales.
Tout d’abord, la proposition de loi prévoit un effort sensible et nécessaire d’harmonisation des règles relatives à la campagne électorale.
Ainsi, en l’état du droit, et du fait d’une divergence entre la partie législative et la partie réglementaire du code électoral, la tenue de réunions publiques est possible la veille du scrutin, tandis que la distribution de matériel électoral, le collage d’affiches ou l’émission de messages électoraux dans les médias ou sur les réseaux sociaux sont interdits depuis le vendredi soir, à minuit, ou le samedi matin, à zéro heure.
Il y avait là un véritable paradoxe, qu’il fallait lever. La proposition de loi le permet, en fixant la fin de toutes les opérations de campagne électorale – sans exception – à la veille du scrutin à zéro heure, c’est-à-dire au douzième coup de minuit dans la nuit du vendredi au samedi. Ainsi, les règles sont clarifiées et les candidats pourront souffler vingt-quatre heures avant d’entrer dans le « chaudron » du jour du vote.
Cette disposition garantit, à la fois, l’égalité entre tous les candidats et la clarté, puisque la même obligation de fin de campagne s’appliquera à tous les actes.
L’autre grande avancée permise par ce texte consiste à rendre toute leur sincérité aux bulletins de vote. La loi interdit déjà de faire figurer sur un bulletin de vote le nom d’une personne qui ne s’est pas portée candidate. Cependant, cette interdiction fait l’objet d’une jurisprudence assez permissive. Grâce à ce texte, nous avons l’occasion de remettre les choses en place.
Ainsi, l’interdiction de faire mention du nom d’un tiers sur un bulletin de vote est explicitement renforcée au travers de cette proposition de loi. Cela évitera des détournements ou des pièges pour les électeurs.
Par ailleurs, certains candidats avaient également poussé leur avantage jusqu’à faire figurer, sur leurs bulletins de vote, des photos de tiers… Cela me semble très néfaste, et surtout malhonnête vis-à-vis des électeurs du fait des dérives auxquelles on peut aboutir. Le texte permet de mettre un terme à de telles démarches, en interdisant formellement la présence de photos ou de représentations autres que celles des candidats sur leurs bulletins de vote.
Je tiens à souligner que la proposition de loi d’Alain Richard permet bien d’autres progrès pour notre loi électorale, y compris en dehors des recommandations émises par le Conseil constitutionnel.
Je pense, en particulier, aux précisions sur les délais et la qualité de la déclaration de situation de patrimoine à produire pour prétendre au remboursement des frais de campagne. Le code électoral était jusqu’ici trop flou et cette proposition de loi règle la question, en se fondant sur les propositions de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, la HATVP.
Ces propositions de loi organique et ordinaire permettent donc de faire progresser notre droit électoral et c’est pourquoi, au nom du Gouvernement, j’émets sur ces dernières un avis tout à fait favorable.
Je sais que nous risquons d’être pris par le temps lors de leur examen. Compte tenu de leur importance, le Gouvernement veillera à ce qu’elles soient, si c’est nécessaire, réinscrites dans les meilleurs délais à l’ordre du jour.