Intervention de Françoise Gatel

Réunion du 2 mai 2019 à 14h30
Clarification de diverses dispositions du droit électoral — Discussion d'une proposition de loi et d'une proposition de loi organique

Photo de Françoise GatelFrançoise Gatel :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après la fin des années quatre-vingt, marquées par ce que l’on a appelé des « affaires politico-financières », c’est-à-dire des financements occultes et des fraudes, les années quatre-vingt-dix ont constitué un tournant ; plusieurs textes successifs sont venus organiser de manière stricte les règles de financement de la vie politique, notamment des campagnes électorales.

Je salue la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui. Elle découle d’observations du Conseil constitutionnel. Elle vise à clarifier en apportant de la cohérence aux dispositions du droit électoral, notamment celles qui concernent les comptes de campagne et la propagande électorale.

L’agrégat de dispositions pour le moins sédimentées au sein du code électoral, modifiées au fil du temps sans véritable réflexion globale, a affaibli la lisibilité et la cohérence des procédures électorales. En effet, depuis 2011, sept lois ont modifié le chapitre relatif au financement et au plafonnement des dépenses électorales. Les démarches administratives complexes créées par cet enchevêtrement juridique posent d’autant plus problème que le nombre de candidats ayant dû déposer un compte de campagne est en hausse notable. De ce fait – cela a été rappelé –, le risque de contentieux s’est accru, et les instances chargées du contrôle sont en surrégime.

Je salue ainsi la proposition du rapporteur dispensant les candidats ayant obtenu moins de 5 % des suffrages et dont les recettes et dépenses n’excèdent pas un certain montant de recourir à un expert-comptable. Une telle obligation peut en effet se révéler inutile et excessivement coûteuse, sans être systématiquement source de clarté supplémentaire…

Le texte apporte plus de lisibilité en harmonisant les règles d’inéligibilité pour les candidats aux élections municipales, départementales ou régionales. Il reviendra au juge de prononcer l’inéligibilité lorsque les comptes seront rejetés « à bon droit », en cas de manquement d’une particulière gravité ou de volonté de frauder. Il ne s’agit donc plus d’une obligation. Cette marge d’appréciation permettra ainsi au juge de ne pas prononcer l’inéligibilité pour des erreurs vénielles.

Mais les magistrats peuvent parfois faire preuve d’une rigueur excessive dans leur interprétation. Nous nous souvenons tous de collègues de bonne foi déclarés inéligibles pour avoir procédé à une avance de certaines menues dépenses de campagne alors qu’ils ne pouvaient pas faire autrement.

Aujourd’hui, l’inéligibilité, lorsqu’elle est prononcée, peut avoir des répercussions variables, donc inéquitables. Elle prend effet à partir de la décision du juge. Or, pour la même élection, le délai d’instruction varie d’un dossier à l’autre, a fortiori avec l’engorgement lié à la hausse des contentieux. Ainsi, un candidat dont le dossier aura été instruit très rapidement pourra avoir la possibilité de se présenter au scrutin suivant, ce qui n’est pas le cas de celui dont le jugement ne sera prononcé que quelques mois plus tard.

Je salue donc la proposition du rapporteur visant à moduler la durée de l’inéligibilité, notamment au regard du calendrier électoral, afin de garantir une équité entre deux ou plusieurs candidats en situation similaire.

Une autre incohérence existe à ce jour. Il est possible de faire une réunion publique la veille de l’élection jusqu’à minuit, mais pas de distribuer le moindre document de propagande : c’est interdit dès l’avant-veille. La proposition de loi revient utilement sur une telle incohérence pour harmoniser et simplifier les délais.

Par ailleurs, la standardisation des bulletins de vote, sans photo ni nom d’une tierce personne, nous semble aller dans le bon sens, afin d’éviter d’induire les électeurs en erreur, parfois d’une manière lourde, mais peu visible.

Vous l’avez compris, le groupe Union Centriste estime que les dispositions de cette proposition de loi sont positives, car elles réduisent les incohérences et des complexités inutiles. Il votera en faveur de ce texte, en formulant toutefois un vœu : si je salue la réactivité et la célérité de l’auteur de cette proposition de loi et l’enthousiasme du Gouvernement, je pense que nous pourrions nous inspirer plus souvent d’une telle réactivité et célérité dans la fabrique de la loi !

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