Intervention de Joël Labbé

Réunion du 2 mai 2019 à 21h45
Reconnaissance du crime d'écocide — Rejet d'une proposition de loi

Photo de Joël LabbéJoël Labbé :

Il s’agit de repenser totalement l’agencement de notre droit pénal afin d’y intégrer l’environnement en tant que personne propre.

La reconnaissance de l’écocide revêt plusieurs dimensions juridiques, comme nos amendements tendent à le montrer : elle exige, d’une part, l’élargissement de la notion de génocide afin que des actes de guerre reposant sur des atteintes très graves à l’environnement, comme le recours à l’agent orange au Vietnam, puissent être reconnus comme tels et sanctionnés par la juridiction internationale compétente ; elle requiert, d’autre part, le renforcement des peines, mais également des moyens et des périmètres d’action de nos juges nationaux, en cas d’atteintes à l’environnement sur notre sol et au-delà, lorsque ces atteintes emportent des externalités négatives mondiales susceptibles de concerner la santé et la qualité de vie des Français.

Ce deuxième point pourrait être satisfait par la création d’une incrimination nouvelle, que nous proposons de modifier, ou par l’élargissement de dispositions pénales existantes, comme la mise en danger de la vie d’autrui. Il ouvre cependant d’autres débats, dont celui qui concerne les modalités de calcul des amendes par les magistrats afin d’éviter les condamnations symboliques et la censure de la Cour de cassation.

En conclusion, gardons à l’esprit que ce n’est pas l’écologie qui est punitive – j’en ai marre d’entendre cela ! –, mais c’est la société qui doit l’être, quand une majorité en son sein considère qu’un comportement porte atteinte au bien commun, à l’intérêt général, et à celui des générations futures.

Comme le grand débat l’a montré, les citoyennes et citoyens français attendent que nous leur apportions des clés pour agir, et l’action devant le juge pénal en est une.

Enfin, si l’action dans le droit pénal français nous paraît nécessaire, légitime et efficace, il faut également intervenir au niveau du droit pénal international, comme le propose la juriste en droit international, spécialiste des droits de l’homme, Valérie Cabanes : « Ne faudrait-il pas reconnaître un crime international qui puisse protéger l’habitabilité de la Terre de certaines activités industrielles nuisibles au climat, à la biodiversité, à la qualité des sols, à l’approvisionnement en eau potable, à l’océan, à la santé… ? »

À ceux qui considèrent, à juste titre, que la priorité actuelle est à la refondation du pacte social et politique de notre pays, je voudrais dire ma conviction qu’il faut faire de ce sujet un outil pour rebâtir le vivre-ensemble.

Quelle meilleure mise en œuvre du principe de fraternité que l’ambition de travailler à l’amélioration des conditions écologiques d’existence du plus grand nombre ?

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