Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, l’extension des compétences de la Cour pénale internationale au crime d’écocide, tel que la pollution intentionnelle et durable de l’écosystème au Vietnam, par stratégie militaire, afin d’en affaiblir l’ensemble de la population, est une revendication défendue par de nombreux universitaires et qui bénéficie d’un soutien croissant en France et à l’étranger.
Cela nécessite de procéder à la modification en ce sens du traité fondateur de la Cour, et donc de réussir à trouver un consensus au niveau mondial.
La France aurait tout intérêt à se montrer force d’initiative sur le sujet, en commençant par inscrire dans la définition nationale du génocide le fait d’y procéder par des atteintes graves à l’environnement, comme ce fut le cas au Vietnam. Plusieurs décennies après la guerre, l’agent orange produit encore des effets dévastateurs sur les générations actuelles des territoires touchés, où de nombreux enfants développent des malformations importantes.
Notre droit pénal qualifie déjà d’acte terroriste « le fait d’introduire dans l’atmosphère, sur le sol, dans le sous-sol, dans les aliments ou les composants alimentaires ou dans les eaux, y compris celles de la mer territoriale, une substance de nature à mettre en péril la santé de l’homme ou des animaux ou le milieu naturel ». Ce, à condition qu’il se produise « intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur ». Ce sont les dispositions de l’article 421-2 de notre code pénal.
Pour autant, et chacun en conviendra ici, il est peu probable qu’un juge qualifie un jour le gouvernement d’un État, a fortiori celui de la première puissance mondiale, d’entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur.
C’est pourquoi nous proposons de préciser la définition du génocide en complétant le critère « d’atteinte grave à l’intégrité physique ou psychique » par les mots « par tout moyen, dont l’altération de l’environnement naturel de cette population ». Cette précision tend à allonger la dimension temporelle du génocide, dès lors que ce dernier pourrait être regardé comme tel aussi longtemps que l’environnement naturel restera altéré. L’objectif est de dissuader absolument les chefs d’État de recourir à de telles techniques de guerre.