Intervention de Philippe Mouiller

Réunion du 7 mai 2019 à 14h30
Lutte contre les espèces toxiques envahissantes — Vote sur l'ensemble suite

Photo de Philippe MouillerPhilippe Mouiller :

Je pense, notamment, aux maires de petites communes, que je rencontre, qui se sentent démunis face à la demande de leurs concitoyens ayant détecté des nids de frelons sur leur propriété ou sur celle de leur voisin. Cela pourrait paraître anecdotique, mais c’est une réalité vécue au quotidien dans nos mairies.

Si certaines espèces exotiques n’ont aucune incidence, d’autres, qualifiées d’envahissantes, ont des impacts importants sur la biodiversité, l’économie et la santé. La lutte contre la prolifération des espèces exotiques envahissantes participe à la préservation de la biodiversité, en grand danger comme le démontre le rapport rendu hier à l’Unesco par les experts de l’IPBES. À ce titre, le frelon asiatique est un bon exemple.

Arrivé en France en 2004, il s’est répandu, en une quinzaine d’années, sur l’ensemble des départements français. Il constitue une réelle menace pour de nombreuses espèces d’insectes, tout particulièrement pour les abeilles domestiques. C’est pourquoi, depuis un arrêté du 26 décembre 2012, le frelon est classé dans la liste des dangers sanitaires de deuxième catégorie, pour l’abeille domestique, sur tout le territoire national.

En France, la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a donné une définition des espèces exotiques envahissantes. La même loi confie aux représentants de l’État, les préfets, la compétence de lutter contre l’introduction et la prolifération de ces espèces. Il leur revient donc de prendre les mesures adéquates en vertu de leur pouvoir de police spéciale. Toutefois, ils semblent avoir, suivant les départements, une vision différente de l’exercice de leurs prérogatives.

Quant aux élus locaux, certains ont fait le choix de prendre en charge, au niveau communal ou intercommunal, la destruction des nids de frelons chez les particuliers ou ils fournissent des pièges. Souvent, ils diffusent de l’information auprès de leurs administrés sur l’attitude à adopter en cas de découverte de nids de frelons.

Dans sa version initiale, la proposition de loi tendait à renforcer les pouvoirs de police du maire dans la lutte contre l’introduction et la prolifération de ces espèces. Il était ainsi prévu de permettre aux maires, en cas de présence sur une propriété privée d’une espèce exotique envahissante, de mettre en demeure le propriétaire négligent de faire procéder à sa capture, à son prélèvement, à sa garde ou à sa destruction.

Dans l’hypothèse où le propriétaire n’obtempère pas à la mise en demeure, après un certain délai, le maire peut faire procéder d’office à l’exécution de ces opérations, aux frais du propriétaire. Il s’agissait de créer un pouvoir de police spéciale pour les maires. Toutefois, cette proposition a paru poser des inconvénients juridiques, environnementaux et matériels. En effet, la coexistence de deux pouvoirs de police spéciale risquait de conduire à une déresponsabilisation. L’efficacité passe par une clarification du rôle de chacun. De plus, il est toujours délicat pour une commune d’intervenir sur une propriété privée. La probabilité d’un contentieux est forte.

C’est pourquoi la proposition de la commission des lois visant à compléter l’article L. 411-8 du code de l’environnement, en laissant aux préfets, seuls, la compétence de lutter contre l’introduction et la propagation des espèces exotiques envahissantes et à faire du maire un lanceur d’alerte me paraît un bon compromis.

Dans la version adoptée en commission, le maire devient donc un maillon essentiel dans la chaîne de lutte contre ces espèces. Véritable sentinelle, il aura pour mission d’informer la population sur les risques et pourra alerter le préfet en cas de découverte d’espèces envahissantes sur sa commune, pour permettre de prendre les mesures adéquates. En cas de menace grave et imminente, le maire a toujours la possibilité d’agir en vertu de son pouvoir de police générale.

Cette proposition de loi est examinée suivant la procédure de législation en commission, mise en place au Sénat sur l’initiative de son président, Gérard Larcher. Elle me paraît tout à fait appropriée à ce type de texte, qui exige d’être réactif, tout en garantissant un examen approfondi.

Pour tous ces arguments, le groupe Les Républicains votera naturellement en faveur de cette proposition de loi.

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