Intervention de Colette Mélot

Réunion du 7 mai 2019 à 14h30
Réforme de la politique agricole commune — Suite de la discussion et adoption d'une proposition de résolution européenne dans le texte de la commission

Photo de Colette MélotColette Mélot :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me félicite de la tenue de ce débat sur l’avenir de la politique agricole commune, quelques semaines avant les élections européennes. C’est en effet le moment opportun pour rappeler toute l’importance de l’agriculture et des agriculteurs en Europe et en France.

La PAC est sans conteste une politique européenne stratégique, confrontée à de nombreux défis, qui devra être fermement défendue par les futurs députés européens français tout au long de leur mandat, et ce dès leur entrée en fonction. En effet, les débats qui se sont tenus au Parlement européen sur l’avenir de la PAC ont été mis en suspens avec le renouvellement des institutions et n’ont pas abouti à un vote en séance plénière. Seule la commission de l’agriculture a adopté sa position : elle est équilibrée et tente de mieux refléter les attentes des agriculteurs et des consommateurs, comme le fait d’ailleurs cette proposition de résolution du Sénat.

Du côté du Conseil, nous ne pouvons que constater des divisions profondes entre États membres. La France devra se montrer plus que jamais convaincante dans les prochains mois pour que ses partenaires la soutiennent, afin d’aller dans le sens du maintien d’une PAC commune et ambitieuse.

Les cartes restent donc sur la table. Tout est encore possible pour l’avenir de notre agriculture européenne, le meilleur comme le pire, et les risques pesant sur l’avenir de la PAC demeurent omniprésents.

La vigilance sera primordiale pour éviter tout détricotage de la politique agricole commune lors des négociations à venir entre le Parlement européen et le Conseil. J’en veux pour preuve les propositions de la Commission, qui s’inscrivent, comme le souligne la proposition de résolution, dans le sens d’une renationalisation de la PAC. Nous ne pouvons être d’accord avec une telle démarche, qui reviendrait à faire marche arrière sur l’une des politiques européennes les plus intégrées.

Comme le souligne également la proposition de résolution, il est inconcevable d’accepter une baisse de 5 % du budget de la PAC. Opérer une telle coupe budgétaire reviendrait à faire de la PAC une variable d’ajustement du budget européen, alors qu’elle est le ciment de l’architecture européenne. Nous ne devons pas oublier que l’Europe est avant tout une puissance agricole : son budget ne doit pas être sacrifié sur l’autel des nouvelles priorités européennes par manque d’ambition budgétaire des États membres. Au contraire, nous devons davantage soutenir nos agriculteurs, qui font face à de nombreux défis : des normes de plus en plus exigeantes et de nouvelles demandes des consommateurs.

L’alimentation de qualité est un enjeu majeur de nos territoires et sociétés. La concurrence est de plus en plus rude face aux autres puissances agricoles mondiales, les enjeux climatiques et environnementaux sont de plus en plus prégnants. Face à cette situation, il est primordial de préserver et protéger notre agriculture, mais aussi de la renforcer en la rendant plus compétitive, tout en préservant l’environnement. Il faut donc l’accompagner dans sa transition et son évolution, ce qui demande des moyens adéquats et des réponses adaptées. Nous l’avons déjà fait avec la loi Égalim ; il faut poursuivre ce travail et veiller à ce que les mesures adoptées soient bien mises en œuvre sur toute la chaîne alimentaire.

Il faut aussi que la future PAC accompagne la transition vers une meilleure répartition de la valeur entre le producteur, le transformateur et le distributeur. Il convient également d’adapter le droit de la concurrence aux spécificités agricoles et de lutter davantage contre les pratiques déloyales de firmes internationales et transnationales.

Il est également primordial de soutenir les petits agriculteurs, qui représentent le cœur de l’agriculture européenne, comme ceux qui se trouvent dans des zones à handicaps naturels. La Commission le propose déjà dans ses textes ; il faut aller plus loin, ainsi que sur les mesures valorisant les externalités positives de l’agriculture au regard des services qu’elle rend à la société et à l’environnement.

Par ailleurs, l’installation des jeunes agriculteurs doit constituer un pan primordial de cette politique. Je me félicite d’ailleurs de la récente initiative prise par la BEI et la Commission pour lancer un programme européen visant à financer à hauteur de 1 milliard d’euros des prêts à taux réduits destinés aux jeunes agriculteurs. Cela contribuera au renouvellement indispensable des générations dans le monde agricole.

Enfin, l’innovation doit être au cœur des priorités de l’agriculture de demain. Les moyens mis en place sont un signe positif de la volonté d’accompagner les agriculteurs dans cette transition. Il faudra que cela soit une opportunité pour eux et non pas un fardeau supplémentaire.

Finalement, la nouvelle réforme de la PAC doit être considérée comme une occasion de nous poser la question du modèle agricole européen que nous souhaitons pour l’avenir : l’agriculture doit rester une priorité européenne, au vu de ses enjeux économiques, territoriaux et environnementaux. Nous devons réfléchir ensemble, avec nos partenaires, pour trouver les meilleures voies et les moyens budgétaires adéquats qui permettront de remplir ces objectifs.

Dans le contexte du Brexit, une attention particulière devra aussi être portée à la préservation des relations commerciales futures entre le Royaume-Uni et l’Union européenne dans les domaines de l’agriculture et de la pêche, en veillant avant tout à préserver les intérêts des agriculteurs français et européens.

Le groupe Les Indépendants soutiendra bien évidemment cette proposition de résolution européenne.

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