Intervention de Jean Bizet

Réunion du 7 mai 2019 à 14h30
Réforme de la politique agricole commune — Suite de la discussion et adoption d'une proposition de résolution européenne dans le texte de la commission

Photo de Jean BizetJean Bizet :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, voilà maintenant près d’un an, le Sénat votait sa deuxième proposition de résolution européenne sur la réforme de la politique agricole commune. Nous étions alors nombreux sur ces travées à juger que le débat s’engageait sur des bases extrêmement inquiétantes. Aujourd’hui, force est de le constater, ces inquiétudes ne sont pas levées, tant s’en faut. La première d’entre elles porte évidemment sur les ressources budgétaires allouées à l’agriculture européenne.

Le projet de cadre financier pluriannuel de 2021 à 2027 marque à ce titre une véritable rupture, en prévoyant des coupes d’un niveau inégalé, bien supérieur aux 13 milliards d’euros correspondant au Brexit. C’est ainsi qu’une baisse de 15 % est proposée, ce qui représente un manque à gagner de près de 7 milliards d’euros pour l’ensemble de la ferme France et engage la pérennité des filières les plus fragiles, ainsi que la survie économique de nombre d’exploitations à travers notre pays.

Le Gouvernement, sitôt ces annonces connues, s’est bien sûr empressé de contester ce déclin de l’ambition agricole de l’Europe. La vigueur de sa réaction ne saurait toutefois faire oublier à quel point elle fut tardive. En effet, focalisé sur le financement de nouvelles politiques européennes, le Gouvernement a relégué l’agriculture au second rang des priorités françaises durant les discussions budgétaires préparatoires.

En refusant de jouer son rôle de premier défenseur de la PAC auquel nos partenaires étaient habitués, il a de facto donné blanc-seing à la Commission pour proposer l’atrophie des crédits agricoles. Sachez que, lors des différentes rencontres que j’ai pu avoir avec mes partenaires dans les conférences spécialisées pour les affaires communautaires, c’est un message que j’ai malheureusement régulièrement entendu.

Cette erreur est lourde de conséquences, car chacun sait qu’une fois posées les bases d’une négociation il devient très difficile d’en inverser totalement les paradigmes.

Tous les grands pays producteurs de la planète mènent une politique stratégique de renforcement de leurs concours publics à l’agriculture, cela a été évoqué par un certain nombre de nos collègues. Je vous le rappelle, les États-Unis y consacrent pratiquement 498 dollars par Américain, alors que l’Europe n’y consacre que 198 dollars par habitant.

La question financière, pour centrale qu’elle soit, ne doit cependant pas nous conduire à ignorer l’autre sujet de préoccupation de cette réforme de la PAC, à savoir le nouveau modèle de mise en œuvre proposé par la Commission elle-même au travers de l’élaboration par les États membres de plans stratégiques nationaux.

Bien sûr, nous sommes tous en faveur d’une meilleure application du principe de subsidiarité, et nous savons tous que la PAC ne peut faire l’économie d’une simplification administrative supplémentaire. Toutefois, gardons à l’esprit qu’il doit s’agir avant tout de simplifier la vie des agriculteurs et non pas celle de la Commission, qui cherche surtout ici à se défaire d’une charge administrative en la transférant aux États membres.

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