Les conditions économiques de 2019 me paraissent très différentes de celles que nous connaissions en 2012. Il nous faut donc réfléchir aux éventuelles propositions de modifications du TSCG ou du dispositif général en fonction de cette nouvelle scène économique.
Pour ma part, je ne pense pas que le TSCG ait privé les États de leur autonomie budgétaire. Nous avions eu ce débat en 2012, au moment de la transposition du traité. Je vous le rappelle, le Conseil constitutionnel a considéré que celui-ci « n’a procédé à aucun transfert de compétences en matière de politique économique et budgétaire. » Voilà une décision qui est claire !
Le traité a-t-il ouvert la voie à l’austérité budgétaire ? Je ne le pense pas non plus. Selon moi, nos dépenses publiques, dont la maîtrise passe non par des coupes brutales, mais par le ralentissement de leur croissance en volume, évoluent conformément aux engagements que nous avions pris. On voit d’ailleurs que nous ne sommes pas dans une période d’austérité budgétaire.
Les résultats sont, en revanche, plutôt positifs. En effet, nous avons créé 600 000 emplois en deux ans, et les investissements productifs sont en forte hausse, comme le patronat l’a indiqué la semaine dernière. De plus, notre déficit est ramené sous la barre de ces fameux 3 %, même si nous ne faisons pas preuve de fétichisme à cet égard. Nous avons été au-dessus de ce pourcentage ; nous sommes aujourd’hui au-dessous. Il existe un « objectif à moyen terme », et c’est ce chemin qu’il faut suivre.
En revanche, l’ensemble du dispositif est devenu tellement compliqué que plus personne n’y comprend rien. Nous avons, en sus du TSCG, le pacte de stabilité, auquel s’ajoutent le six pack et le two pack… Absolument plus personne ne s’y retrouve ! Je pense donc que l’une des premières choses à faire est de réécrire l’ensemble de ces dispositions de façon claire. En effet, la démocratie ne se porte pas bien lorsque ni les parlementaires, ni les économistes, ni l’opinion publique ne comprennent ce que l’on fait.
De plus, la mise en œuvre de ces dispositions est sujette à erreur. Nous l’avons vu notamment à propos du calcul du solde structurel : elle a donné lieu à une longue discussion, qui n’est pas encore close.
L’économiste Jean Pisani-Ferry déplore que l’objectif d’un déficit structurel à zéro empêche les gouvernements de profiter des taux d’intérêt durablement bas, qui sont ceux d’aujourd’hui, pour financer les investissements économiquement rationnels et utiles aux générations futures. Aujourd’hui, c’est le moment d’acheter une maison, puisque les taux d’intérêt sont à 1 %. Il en va de même pour le Gouvernement, qui devrait donc aller dans cette voie.
Un certain nombre d’économistes allemands et français ont proposé de substituer aux règles actuelles une règle unique fondée sur le taux de croissance des dépenses publiques. Autrement dit, on oublierait le fétichisme des 3 %, auquel succéderait un taux de croissance du PIB, par rapport auquel les dépenses publiques devraient se cadrer. Ce sujet mérite, à mon sens, d’être débattu, ce qui nous conduirait à nous interroger sur une modification du TSCG.
Les mêmes économistes proposent que les États en déficit par rapport à l’objectif à moyen terme émettent, dans un certain nombre de cas, ce qu’on appelle des « obligations juniors », c’est-à-dire dont le degré d’appel est moins important que les autres éléments de l’actif.
Enfin, le vrai débat porte sur l’approfondissement de l’Union économique et monétaire. Nous avons proposé la mise en place d’une union budgétaire reposant non seulement sur la surveillance des politiques budgétaires nationales, mais aussi sur la solidarité.
Le ministre passe beaucoup de temps à essayer de convaincre ses partenaires. L’Allemagne semble avoir évolué de façon positive, acceptant le principe de la création d’un budget pour la zone euro, qui permettrait aux États membres de financer les investissements d’avenir et de mieux résister aux chocs macroéconomiques. Cependant, cette proposition n’est pas approuvée par tous les Européens. Elle se heurte à l’hostilité d’un certain nombre de pays, notamment scandinaves, qui sont favorables à la réduction des dépenses et des risques.
La campagne des élections européennes me paraît le moment propice pour mener ces débats et observer quelles réponses le pays apportera à ces questions.