Intervention de Bernard Jomier

Commission des affaires sociales — Réunion du 14 mai 2019 à 16h40
Projet de loi relatif à l'organisation et à la transformation du système de santé — Audition de mmes agnès buzyn ministre des solidarités et de la santé et frédérique vidal ministre de l'enseignement supérieur de la recherche et de l'innovation

Photo de Bernard JomierBernard Jomier :

On ne peut que souscrire aux principes affichés par ce projet de loi. Mais il demeure ouvert - si on veut être positif - ou flou - si l'on veut être réaliste. Il est en effet difficile de percevoir quelle sera l'application réelle de ces principes sur les études. La suppression du numerus clausus n'aura pas de conséquences : il est passé cette année de 3 250 à 9 300 cette année, sans besoin d'intervention législative ; il passera sans doute symboliquement la barre des 10 000, mais les moyens des universités ne permettront pas d'aller beaucoup plus loin. Évidemment, nous souscrivons à cette suppression, mais il faut la ramener à sa juste mesure. Elle est plus intéressante sur la partie qualitative : nous souscrivons à la suppression de la méthode actuelle de sélection, mais en attendre une conséquence sur les choix des étudiants dans leur vie professionnelle nous paraît un peu trop optimiste. C'est pendant le second cycle que tout se joue. Vous proposez de lever un verrou à l'organisation du second cycle et nous y souscrivons également, mais une fois que ce verrou sera levé, l'important sera de voir ce qui se passe réellement pendant le second cycle. Or vous nous demandez dans ce domaine de vous faire confiance, puisqu'à l'Assemblée nationale, vous avez écarté l'ensemble des amendements sur ce sujet et n'avez pas davantage proposé de modifier la directive sur les contenus de formation.

Sur l'organisation du système de soins, nous avons assez largement souscrit au principe de « Ma santé 2022 ». La construction ascendante des projets de santé est une bonne chose, mais la complexité de la rédaction de l'article pourrait dissuader les professionnels de santé de s'engager dans les CPTS : cela leur demandera un travail qui ne leur laissera pas beaucoup de temps pour le soin et, là encore, rien n'est dit des moyens qui y seront consacrés.

Nous souscrivons aussi au principe de gradation dans la réponse, mais les hôpitaux de proximité sont entachés d'une faiblesse dans leur description. Présenterez-vous des amendements lors de la discussion qui va s'ouvrir au Sénat ? Le Haut Conseil a produit une définition des hôpitaux de proximité ; peut-être pourrait-on reprendre tout simplement cette définition ? En revanche, sur la naissance et la maternité, vous ne défendez pas vraiment une logique de gradation, puisque votre argument est que la sécurité sanitaire nous impose de réduire l'offre en la matière. On pourrait pourtant travailler à un nouveau maillage, y compris avec les maternités de niveau 1, pas seulement les centre périnataux mais à partir d'une gradation entre des maternités de niveau 1, 2 et 3. Le mouvement de concentration dans les GHT que vous proposez de poursuivre ne me semble pas très satisfaisant en termes de gouvernance médicale, car je crains que cette concentration ne se traduise par une allocation des moyens qui ne favorise pas la proximité. Mais surtout, il n'y a rien dans votre texte sur la permanence des soins ambulatoires (PDSA) alors même que la question des urgences est aussi un des principaux dossiers qui préoccupent nos concitoyens. Rien non plus sur les plateformes territoriales d'appui (PTA), qui ont été instaurées dans une loi précédente : allez-vous intervenir sur cette question dans le débat ?

Je souscris à l'idée d'une meilleure valorisation de professionnels sous-utilisés jusqu'à présent, tels que les infirmiers et les pharmaciens. Mais une limite ne doit pas être franchie : le principe général de séparation de la prescription et de la réalisation d'une prestation. Cela doit être très strictement encadré, sous peine de de dérives.

Vous mettez des élus partout, mais je ne suis pas persuadé que ce soit la question. Les conseils de surveillance ont dix ans maintenant, les élus y sont présents, même si c'est trop faiblement, et il leur manque quelques prérogatives pour un meilleur équilibre des responsabilités dans la gouvernance hospitalière. C'était l'occasion de traiter le problème - ou bien l'avez-vous ignoré délibérément ?

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