Intervention de Jean-Michel Blanquer

Réunion du 14 mai 2019 à 21h30
Pour une école de la confiance — Article 1er bis A

Jean-Michel Blanquer :

Monsieur le sénateur, j’ai moi aussi beaucoup aimé le début de votre intervention, et j’approuve tout ce que vous avez dit en préambule : c’est précisément la raison pour laquelle j’émets, à mon tour, un avis défavorable.

J’ai souvent l’occasion de le rappeler : j’ai vécu dans des pays étrangers, j’ai passé une bonne partie de ma vie sur d’autres continents, notamment en Amérique latine. Je suis toujours frappé de voir que, dans de nombreux pays, de telles questions ne se posent pas vraiment. Le drapeau et l’hymne national font même l’objet d’un consensus parfait dans tous les pays que je connais ! Tout le monde y trouve totalement normal que les enfants apprennent très tôt à connaître et à respecter le drapeau et l’hymne national.

C’est donc, pour moi, une source de tristesse d’avoir à discuter, parfois à ferrailler sur cette question, alors même qu’elle devrait être sereine.

J’observe toutefois que, depuis quelques années, en particulier depuis 2015, ce sujet est devenu plus consensuel, peut-être pas entre les partis politiques, dans le débat public entre les élites, mais dans la société elle-même.

Il y a quelques mois, je me suis rendu dans un collège en REP+ de Montpellier. Après avoir visité cet établissement, je me suis promené dans la rue et j’ai croisé des élèves ; leurs profils sociaux étaient ceux que l’on peut rencontrer dans les collèges de ce réseau. Pendant quelques minutes, j’ai parlé avec ce groupe d’enfants ; et, quand nous nous sommes quittés, assez joyeux de l’entretien que nous avions eu, ces élèves, dont la plupart étaient certainement issus de l’immigration, m’ont spontanément chanté La Marseillaise, comme pour me faire plaisir, alors que nous avions eu une discussion totalement informelle.

Une telle scène ne se serait sans doute pas produite quelques années auparavant ; et j’ai vécu d’autres moments comparables lors de mes visites sur le terrain, au cours de mes dialogues avec les élèves.

À l’évidence, les élèves eux-mêmes expriment le besoin, au fond assez naturel dans la société, de s’identifier à l’hymne et au drapeau. On ne saurait nier ce besoin sans leur faire du mal.

Tous les élèves du monde ont sans doute ce besoin de sentir qu’ils appartiennent réellement à la Nation dans laquelle ils vivent, en l’occurrence la Nation française, dont nous sommes si fiers, dont vous-même avez parlé avec tant de fierté en évoquant l’épisode du 11 novembre 1940.

Nous ne devrions pas nous diviser sur de tels sujets : après que j’ai accepté cette disposition, j’ai constaté d’assez sérieuses polémiques, suscitées par d’autres amendements déposés à l’Assemblée nationale. Pour ma part, je persiste à le penser : c’est une très bonne chose que La Marseillaise soit connue par nos élèves, qu’elle devienne pour eux une référence naturelle. C’est pourquoi sa présence quotidienne sous leurs yeux me paraît tout à fait judicieuse.

Je confirme que la question budgétaire est, en l’occurrence, totalement marginale : nous sommes parfaitement capables d’imprimer une telle affiche à un coût modique – on avait fait de même pour la charte de la laïcité.

À mon sens, la présence du drapeau et de l’hymne dans les écoles a une vertu éminemment pédagogique : elle n’a rien de vertical, elle n’a rien de comminatoire, elle n’a rien d’offensant. Elle représente tout simplement la présence de la République dans le quotidien de nos élèves. C’est à mon avis ce que nous souhaitons tous !

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