Intervention de Laurent Béteille

Réunion du 23 janvier 2009 à 10h00
Accélération des programmes de construction et d'investissement — Article 3

Photo de Laurent BéteilleLaurent Béteille, rapporteur pour avis :

Outre des améliorations rédactionnelles, cet amendement relève le plafond de l'acceptation de la cession de créance à 100 %.

Je rappellerai que, si le Parlement a refusé, dans la loi n° 2008-735 du 28 juillet 2008 relative aux contrats de partenariat, que l’intégralité de la rémunération due par la personne publique au partenaire privé puisse faire l'objet d'une cession de créance acceptée par la personne publique – un plafond de 80 % avait été retenu –, il apparaît nécessaire, à la réflexion, de revenir sur ce plafond, dont le bilan coût-avantages ne s’avère guère satisfaisant du point de vue de la personne publique. En effet, son coût est relativement important et ses avantages sont loin d’être évidents.

En premier lieu, son coût est relativement important pour la personne publique puisque le plafonnement l'empêche de disposer du taux d'intérêt le plus bas. Un certain nombre d’opérateurs nous ont éclairés sur ce sujet lors des auditions que nous avons pu mener depuis l’adoption de la loi.

En second lieu, ses avantages ne sont pas évidents : il n’est pas certain qu'une acceptation à 100 % de la créance supprime tout risque pour le partenaire privé.

Il faut rappeler tout d’abord que l'acceptation ne porte que sur le loyer remboursant les coûts d'investissement et de financement, et non sur les coûts de maintenance et d'exploitation qui vont suivre. Or ces derniers peuvent représenter une part tout à fait significative du montant global du contrat, pouvant parfois aller jusqu'à 60 %. En conséquence, le partenaire privé reste incontestablement dans une situation de risque.

Par ailleurs, l’acceptation de la cession de créance est subordonnée à la constatation par la personne publique que les investissements ont bien été réalisés conformément au contrat. Il existe donc une sorte de réception, même si elle ne porte pas ce nom-là, qui intervient avant que la cession de créance ne puisse être acceptée.

Par ailleurs, sur l'initiative de la commission des lois, le législateur a rendu obligatoire, dans le cadre d'un contrat de partenariat conclu par une collectivité territoriale, la souscription par le partenaire privé d'une assurance dommages ouvrage. Nous sommes convenus avec l'Assemblée nationale de maintenir cette obligation pour les collectivités territoriales, l’État pouvant, lui, éventuellement en dispenser le partenaire privé.

Dans ces conditions, la commission des lois estime que ces trois mécanismes prouvent qu'il n'est pas opportun de fixer par principe un plafond et qu'il appartient à la personne publique contractante d'apprécier au cas par cas, en fonction des caractéristiques du projet, si elle s'expose à un risque en allant au-delà de 80 % et, dans cette hypothèse, si ce risque n'est pas acceptable au regard de l'intérêt financier qu'elle retire de l’opération.

Notre démarche est donc fondée sur la liberté contractuelle et la responsabilisation des acheteurs publics.

Au surplus, je voudrais attirer l’attention du Sénat sur le fait que le plafonnement de 80 % n’est pas favorable aux PME. En effet, répugnant actuellement à prendre le moindre risque, les banques exigent une part toujours plus importante de fonds propres dans le financement des projets. Si les majors du BTP sont en mesure d’engager des fonds propres sur ce type d’opération, les PME auront, elles, davantage de difficultés à le faire sur les petits contrats. Or il est primordial que les PME puissent également bénéficier de ces contrats de partenariat.

Pour l'ensemble de ces raisons, cet amendement entend réintroduire la possibilité d'acceptation de la cession de créance à 100 % qui existait antérieurement à la loi du 28 juillet 2008, dans le cadre de la cession de droit commun dite « cession Dailly ».

Si l’on veut effectivement relancer l’économie, il serait bon de ne pas trop appuyer sur le frein !

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