Cet amendement, comme le précédent, vise à empêcher la généralisation des pôles inclusifs d’accompagnement localisés, les PIAL, introduite par ce projet de loi alors même que les expérimentations en cours n’ont donné lieu à aucune évaluation.
Le choix de généraliser les accompagnements mutualisés peut sembler compréhensible, puisqu’il permet aux accompagnants d’effectuer un nombre d’heures suffisant pour disposer de revenus décents – vous l’avez dit, monsieur le ministre.
Toutefois, pour quiconque a fait l’effort de se renseigner sur le sujet, il saute aux yeux qu’il s’agit d’une très mauvaise solution à un problème pourtant bien réel.
Outre que cette modalité d’accompagnement est très difficile à appliquer, notamment dans les zones rurales où les établissements sont trop éloignés, les mutualisations se traduisent, là où elles sont déjà mises en œuvre, par une dégradation très importante de la qualité de l’accompagnement.
Dans un contexte austéritaire où l’offre d’accompagnement est bien souvent inférieure aux besoins, les AESH se retrouvent à devoir arbitrer entre les élèves pour savoir à qui ils consacreront leurs heures, par exemple lorsque celles-ci se chevauchent dans les emplois du temps. La mutualisation conduit en fait, le plus souvent, à réduire le temps de suivi et à dégrader la prise en charge.
Quant à l’apport d’un tel mécanisme pour les accompagnants, si l’objectif est d’améliorer leur situation, force est de constater que le moyen est contre-productif. Partout où elle est déjà mise en place, la mutualisation mène à une dégradation des conditions de travail : les trajets entre établissements augmentent, et ne sont pas toujours remboursés, les pressions hiérarchiques, parfois contradictoires, se multiplient, etc.
Des solutions simples et efficaces pour donner aux AESH des conditions de travail décentes existent, par exemple la création d’un statut ou la prise en compte des heures de travail invisibles – nous aurons l’occasion d’y revenir tout à l’heure.
La mutualisation ne permet ni un meilleur accompagnement ni de meilleures conditions de travail pour les accompagnants. Son objectif est purement comptable : elle permet de rationaliser à l’envi l’accompagnement et de donner à sa gestion une orientation quantitative – il ne s’agit plus de partir des besoins, mais de se partager les moyens alloués dans un contexte de pénurie. Cette logique est aux antipodes de l’ambition de la loi de 2005.
Le sujet de l’école inclusive mérite mieux – nous sommes tous d’accord sur ce point. Ne nous satisfaisons pas de simples solutions comptables aux conséquences sur le terrain souvent désastreuses.