Je suis d'accord avec M. Leconte sur la problématique des électeurs ressortissants européens. Dans ma commune, nous avons dû évoquer concrètement cette question avec les présidents de bureau de vote, car des électeurs qui croient en toute bonne foi avoir le droit de vote ici découvriront, le soir du scrutin, qu'ils ne l'ont plus.
La question de la date du retrait du Royaume-Uni était assez imprécise dans le texte initial. L'article 50 du traité sur l'Union européenne a pour conséquence la suppression radicale de toute relation entre la nation sortante et l'Union européenne. Mais si un accord est signé - et tout porte à croire que ce soit celui issu des négociations de 2018 - cela entraînera des dates différenciées en fonction des conséquences économiques et financières qui en découleront. Mais il n'y aura qu'une seule date en ce qui concerne le partage de souveraineté, et donc la participation du Royaume-Uni aux institutions de l'Union européenne.
Nous nous calons sur cette échéance : le texte de l'Assemblée nationale prend comme référence la « date de retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne ». Il sera sans doute utile de faire confirmer cette interprétation par le Gouvernement.
Je partage le fait central soulevé par M. Masson. Si l'on avait appliqué la proportionnalité pure, cela aurait conduit plusieurs nations à n'avoir qu'un seul député, leur interdisant donc une représentation pluraliste. La règle de la proportionnalité dégressive, déjà prévue depuis longtemps dans le droit de l'Union européenne, a été confirmée pour le Parlement européen. Cela a entraîné une surreprésentation des petits pays, mais a abouti à une moindre proportionnalité pour les plus grands pays.
Ce système s'appliquait sur la base d'une décision du Conseil européen. À la suite de la réunification allemande, ce sujet a fait l'objet de vives tensions entre l'Allemagne et la France lors de la négociation du traité de Nice. Le Président de la République Jacques Chirac avait annoncé son objectif d'obtenir le maintien de la parité de représentation en nombre de sièges entre les deux pays, alors que l'écart entre les deux populations était de 25 %. Il n'y est pas parvenu.
La représentation retenue marquait une inflexion de la règle de la proportionnalité dégressive. L'Allemagne a obtenu davantage de sièges qu'elle n'aurait dû en avoir. En 2013, une réduction du nombre de sièges a été décidée pour les élections européennes de 2014, mais ce système a perduré. La décision de juin 2018, qui fixe le nouveau nombre de sièges, a permis de compenser partiellement cet écart : l'Allemagne reste à 96 sièges, alors que la France passe de 74 à 79 sièges. Le Conseil constitutionnel a déjà tranché ce point : il prend en compte le fait qu'un texte, même s'il n'institue pas une égalité optimale de représentation, aille dans le sens d'une réduction des différences.
Durant la période provisoire jusqu'au Brexit, la répartition des sièges résultant de l'accord de 2013 sera maintenue : l'Allemagne aura 96 sièges, et la France 74. Le Gouvernement n'a pas fait preuve de paresse : à la suite de la décision actant le report du Brexit le 10 avril dernier, il a déposé le projet de loi sur le bureau de l'Assemblée nationale le 24 avril. Nous pouvons statuer sur le sujet, mais, monsieur Masson, vous pourrez saisir le Conseil constitutionnel si vous trouvez 59 autres collègues pour vous soutenir. Je n'ai guère de doute sur le sens de sa décision, mais il est exact que la règle de la proportionnalité dégressive en faveur des plus petits pays n'est pas appliquée de façon optimale.