Intervention de Marie-Pierre Monier

Réunion du 27 mai 2019 à 21h45
Conservation et restauration de la cathédrale notre-dame de paris — Article 9

Photo de Marie-Pierre MonierMarie-Pierre Monier :

Pour ma part, je vous livrerai le témoignage d’un élu : « Comment ma commune, propriétaire de l’ancienne cathédrale, peut-elle accepter de continuer à se soumettre aux différents codes si l’État est autorisé à s’en affranchir ? Il est à craindre que l’exemplarité de l’État, s’octroyant des dérogations en matière de règles d’urbanisme, de protection de l’environnement, de préservation du patrimoine et de commande publique, soit mal perçue par les concitoyens à qui il est demandé de se mettre en conformité avec la législation. »

Si nous ne souhaitons pas habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnances dans ce domaine, c’est d’abord parce que nous ne savons pas quelles règles vous entendez contourner, tant les termes du texte nous laissent dans le vague.

Je le redis, par la loi ÉLAN, le Gouvernement a supprimé, malgré nos mises en garde, le garde-fou de l’avis des ABF, qui avait pourtant été revu et simplifié à peine deux ans auparavant au travers de la loi relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, dite loi LCAP, adoptée à l’issue d’une commission mixte paritaire conclusive, attestant que la protection du patrimoine est une préoccupation transpartisane. Nous sommes donc en droit d’avoir des craintes à ce sujet.

En matière d’archéologie préventive, les délais prévus par le droit commun doivent être respectés pour assurer la qualité scientifique requise à tous les stades de l’opération – prescription, fouilles éventuelles et, bien sûr, diagnostic –, mais les dérogations possibles ne la garantissent pas. C’est aussi le cas s’agissant des mécanismes d’autorisation de travaux sur les monuments historiques, qui, selon tous les éléments que j’ai pu recueillir, fonctionnent bien.

C’est là la principale raison qui nous a conduits à supprimer cet article en commission : autoriser des dérogations au droit commun en matière de monuments historiques ou, plus généralement, de patrimoine reviendrait à ouvrir une boîte de Pandore. Comment les élus locaux pourront-ils expliquer que ces dispositions, ces contrôles, ces délais sont essentiels à la préservation du patrimoine, si l’on a pu y déroger pour Notre-Dame de Paris ? Cela reviendrait à montrer le mauvais exemple, alors même que notre législation est un modèle dans le monde entier pour les défenseurs du patrimoine, car elle a permis, depuis cinquante ans, d’en arrêter l’érosion et la destruction dans notre pays. La directrice du centre du patrimoine mondial de l’Unesco nous l’a dit lors de son audition : la France a la chance de disposer de règles qui ont permis de préserver son patrimoine ; ne les cassons pas !

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