Intervention de Dominique Estrosi Sassone

Commission des affaires économiques — Réunion du 29 mai 2019 à 9h30
Proposition de loi visant à améliorer la lutte contre l'habitat insalubre ou dangereux — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Dominique Estrosi SassoneDominique Estrosi Sassone, rapporteur :

Mon amendement COM-28 rectifié est très important. Il porte sur les polices spéciales en matière d'insalubrité et de péril. Le délai de dix-huit mois dont dispose le Gouvernement pour légiférer par ordonnance est devenu trop long depuis les événements de Marseille. Aussi, je vous propose de supprimer la partie de l'habilitation visant à harmoniser et simplifier les polices administratives en matière de lutte contre l'habitat indigne et de modifier directement le droit en vigueur. Je propose de maintenir les deux autres points de l'habilitation mais de réduire son délai de six mois. Le Gouvernement doit accélérer ses travaux.

Cet amendement harmonise et accélère les procédures de police spéciale en matière d'habitat insalubre ou dangereux, en créant une police spéciale du logement qui traite des différents cas de dégradation du logement selon une procédure identique dont les dispositions sont rassemblées dans le code de la construction et de l'habitation.

Les élus étant les mieux à même de traiter ces situations d'habitat dégradé qui les concernent au premier chef, je souhaite que cette police du logement soit exercée par les présidents des EPCI, sauf si les maires demandent à exercer leurs pouvoirs en la matière, l'État conservant son pouvoir de substitution en cas de carence. L'article 40 de la Constitution m'empêche de désigner une autorité unique. Dès lors, dans cet amendement, le président de l'EPCI, ou le maire s'il a décidé de conserver ses pouvoirs, continue à prendre les arrêtés de péril et le préfet à prendre les arrêtés d'insalubrité.

Le fait de ne pas pouvoir, pour des raisons de procédure, désigner une autorité unique implique de maintenir des définitions distinctes pour un immeuble en péril et un immeuble insalubre mais j'estime qu'à terme la police du logement devra s'appliquer à « l'habitat dégradé » qui correspondrait à une définition unique et recouvrirait les cas de péril, d'insalubrité, d'indignité et de non décence. J'ai tout de même pu harmoniser les procédures applicables aux deux situations les plus importantes que sont les immeubles en péril et les immeubles insalubres. Le texte prévoit une définition de ces deux situations. Si la définition du bien en péril correspond au droit actuel, j'ai rassemblé sous une seule définition les différents cas d'insalubrité. Là encore, il y en avait plusieurs.

Le droit de visite est également inscrit, pour plus de lisibilité, dans le code de la construction et de l'habitation. Les délais pour constater la situation d'insalubrité ou de péril et pour remettre le rapport de constat, fixés aujourd'hui chacun à trois mois, sont raccourcis. L'article 5 de la proposition de loi réduit à un mois le délai de visite, ce qui serait manifestement impossible à tenir. Je partage bien sûr avec Bruno Gilles la volonté d'accélérer la phase d'instruction. Néanmoins, j'estime préférable de donner un délai global de deux mois pour visiter les locaux et transmettre le rapport à la personne concernée. Si la visite est faite en une semaine, il reste plus de temps pour faire le constat.

J'ai choisi de maintenir une distinction entre les situations d'urgence et de non urgence. L'existence de revêtements dégradés au plomb en présence d'enfants mineurs et de femmes enceintes sera considérée comme une urgence.

J'ai ensuite harmonisé les procédures non urgentes sur le modèle de la police du péril. En effet, les représentants des propriétaires regrettent de ne pas être aujourd'hui associés en amont dans le cadre de la procédure d'insalubrité. C'est pourquoi je vous propose qu'à l'issue d'une phase contradictoire qui durerait au maximum deux mois à compter de la transmission du rapport, l'immeuble soit déclaré en péril ou insalubre par arrêté. Cet arrêté vaudrait mise en demeure pour le propriétaire de procéder dans un délai déterminé aux mesures et travaux nécessaires pour mettre un terme au péril ou à la dangerosité de l'immeuble. La saisine de la commission départementale compétente en matière d'environnement, de risques sanitaires et technologiques (Coderst) actuellement prévue pour les cas d'insalubrité serait supprimée. Cette tranche du millefeuille rallonge les procédures sans être efficiente.

Une interdiction définitive ou temporaire d'habiter les lieux ou de les utiliser peut être prononcée. L'article 6 de la proposition de loi prévoit qu'en cas d'interdiction définitive, sa date d'entrée en vigueur devrait intervenir au plus tard dans un délai de trois mois contre un délai d'un an actuellement. Je partage avec Bruno Gilles le souhait d'accélérer la phase de relogement mais j'estime par pragmatisme qu'il faut tenir compte du marché du logement. Aussi le délai maximal est-il fixé à six mois dans les zones tendues et à trois mois dans les zones non tendues. À l'issue du délai, si la personne n'a pas exécuté les mesures et travaux prescrits, elle est redevable du paiement d'une astreinte et l'autorité compétente peut exercer les travaux d'office sans qu'il soit procédé de nouveau à une mise en demeure. Les sanctions sont également harmonisées.

J'ai essayé de résumer notre ambition dans cet amendement : clarifier et simplifier les différentes polices et procédures. Nous ne pouvons pas aller jusqu'au bout, vers un acteur unique, mais nous pouvons mettre le Gouvernement au pied du mur.

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